Etat des lieux
J.L.Bobin,
H.Nifenecker, C.Stéphan
Document préliminaire
1999
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#Réserves
#Evolutions#Un modèle
#Pénuries ?
#Energie Solaire#Production domestique d'eau chaude et chauffage
#Principe de la conversion photovoltaïque
#Les différentes filières
#Impact sur l'environnement
#En conclusion
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#Biomasse
#Energie éolienne
#L'hydrogène, combustible de l'avenir#Les économies d'énergie
#Les piles à combustibles
#Le problème spécifique des transports.#L'énergie nucléaire
#Cycles Combinés et Cogénération
#Réacteurs standards#Questions de prix
#Les déchets radioactifs
#Surgénérateurs
#Le Nucléaire du futur
#Et la fusion ?
#Annexe I Diffusion des techniques
#Annexe II L'énergie en quelques chiffres
#Unités#Annexe III Les cycles de production dans les filières thorium et uranium
#Réactions élémentaires#Réactions chimiques#Consommation d'énergie et réserves
#Réactions nucléaires#La fission nucléaire
#La Fusion Nucléaire#Consommation mondiale d'énergie#Energies renouvelables
#Le cas français
#Comparaisons#Energie solaire#Les Coûts
#Biomasse.
#Eolien
#Impacts environnementaux#Les rejets actuels
#La problématique
#Le programme ExternE#Les hypothèses
#Comparaison des coûts externes des différentes filières
La SFP a lancé depuis deux ans un
débat sur l'Energie au 21 ème siècle. Ce faisant il semble qu'elle ait eu une
prescience des évènements qui se sont produits depuis: conférence de Buenos
Aires, réticences d'abord en Allemagne, puis maintenant en France d'une partie
non négligeable de la population vis à vis de l'industrie électronucléaire. Même
si le Parlement français a voté le maintien d'un programme électronucléaire, il
est probable que le débat national n'est pas clos.
Au sein de la SFP le débat a pris la forme de conférences organisées par les sections locales. L'effort le plus systématique a été celui des sections Normandie et Paris Sud, Paris Centre, et a pris la forme de plusieurs demi-journées de débats et de conférences. Dans d'autres sections la réflexion a été faite dans un cadre plus modeste d'une ou deux conférences. D'une façon générale les participants se sont montrés satisfaits par la qualité des exposés et la richesse des débats. Dans le document qui suit nous nous sommes efforcés de faire la synthèse des principaux enseignements que nous avons tirés de ces débats et conférences. En effet, il nous a paru urgent, sans préjudice d'autres actions qui pourraient être menées telles qu'un atelier au niveau national ou la rédaction d'un livre, de fournir des éléments d’appréciation communs pour permettre á chacun de se forger une opinion. Il nous a semblé que, dès à présent, à partir de ces éléments, il était urgent que la SFP s'exprime sur la question d'une sortie éventuelle du Nucléaire et sur les conséquences prévisibles d'une telle décision.
Le document présent traite de façon
certes sommaire, mais que nous espérons aussi objective que possible:
l'évolution prévisible de la demande énergétique en regard des réserves, les
conséquences en terme de nuisance des modes de production choisis, le rôle
éventuel des formes variées d'énergies renouvelable et du nucléaire. Finalement
la question des coûts est examinée.
L’état présent (milieu des années
90) de la consommation d’énergie à partir de différentes sources est présenté
sur les tableaux 1 et 2.
Tableau 1.
Consommation annuelle planétaire :
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* 1 GTep = 1 milliard de tonnes équivalent pétrole.
** exploitation de la biomasse, essentiellement le bois.
Le tableau 1, statistique planétaire [1], montre que les combustibles fossiles, charbon et hydrocarbures, sont la principale source d’énergie avec plus de 77% du total. L’énergie nucléaire ne fournit qu’une part modeste inférieure à 5%. C’est en partie dû à un usage exclusif pour la production d’électricité qui ne représente elle même que 38 % des besoins d’énergie globaux. Cette vue très générale est affinée par une analyse par pays, tableau 2 [2]. De toute évidence, des pays à forte capacité nucléaire, Allemagne, Etats-Unis, Grande Bretagne, recourent à cette forme d’énergie de façon assez timide surtout en comparaison de la France.
Tableau 2
Consommation (1996 en MTep) dans différents pays à partir des différentes sources :
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* y compris d’autres sources.
** données de 1994.
En 1990 l’état des réserves en
combustibles fossiles et nucléaires était représenté par les chiffres du tableau
3.
Ces données doivent être considérées avec précaution. En effet l’effort de prospection dépend du niveau estimé des réserves. Par exemple dans le cas du pétrole, le chiffre des réserves croit régulièrement depuis 1940, au moins. Mais une étude récente [3] et sur laquelle nous reviendrons, tend à prouver que la tendance s’est inversée vers 1980. Le nombre réel (non biaisé par des influences politiques) d’année de réserve serait en diminution ce qui laisse présager une production en baisse à partir de 2010. Il faut, toutefois, compter avec des ressources non conventionnelles d’hydocarbures : gisements des grands fonds océaniques, schistes bitumineux, sables asphaltiques, hydrates de méthane. Le potentiel de ces gisements non conventionnels est considérable, plusieurs fois supérieur à celui des gisements classiques. L’exploitation de ces gisements pose, toutefois, en général, des problèmes d’environnement local sévères, aussi bien que des problèmes de coûts.
En ce qui concerne le nucléaire, si sa part de marché devait atteindre 40%, le nombre d’années de réserve s’abaisserait à 40 pour une utilisation dans des réacteurs de type PWR et à 2000 ans dans le cas des surgénérateurs. Cependant il deviendrait alors rentable d’exploiter des gisements à faible teneur (y compris les océans) ce qui remonterait le nombre d’années de réserve.
Tableau 3.
Réserves d’énergie planétaires [1].
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au rythme de consommation actuel |
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Schistes
bitumineux et
Sables asphaltiques |
Plusieurs centaines de GTep | Fraction exploitable non déterminée. |
Hydrates de méthane | Plus
de
1000 GTep |
Fraction exploitable non déterminée. |
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Il en va des données énergétiques
comme du baromètre. L’important n’est pas tant la valeur instantanée d’un
indicateur que de savoir s’il croît ou s’il décroît. Il convient donc de
compléter les tableaux précédents par une analyse des tendances.
Elaborée par les chercheurs de
l’I.I.A.S.A. (International Institute for Applied System Analysis, organisme
dont le siège est à Laxenburg près de Vienne), une modélisation assez
convaincante consiste à traiter la pénétration d’une technologie sur un marché
comme la propagation d’une épidémie : modèle diffusif basé sur une équation
logistique. On obtient ainsi le résultat de la figure 1. On voit que pour une
constante de temps (multiplication par un facteur e) d’une décennie et un niveau
de départ égal au millième de la niche, le processus de pénétration du marché
prend environ un siècle. Pendant les quatre premières décennies, la pénétration
reste modeste, inférieure à 10%. Ces effets dynamiques sont le lot commun du
développement de nouvelles technologies. Une technique n’est jamais du premier
coup ni parfaitement au point ni sans risque. Les partisans de l’ordre ancien
ont des arguments à faire valoir et convaincre est un art
difficile.
Part de niche
temps (décennies)
Figure 1.
Il est possible de restituer fidèlement l’évolution des parts de marché dévolues aux différentes sources d’énergie en traitant chacune d’elle suivant le modèle diffusif. Le résultat d’un tel travail (effectué au sein de l’I.I.A.S.A.) est présenté sur la figure 2 reproduite de Cesare Marchetti [4] où la variable F est la part de marché. L’historique recouvre une période de plus d’un siècle. La détermination empirique des constantes conduit par simple extrapolation à des prévisions s’étendant jusqu’en 2050 (courbes lisses).
Comme le tableau 1, cette figure fait
apparaître la domination presque absolue des sources d’énergie fossiles, cette
fois dans le temps, passé et à venir.
Tandis que la part du bois diminue
régulièrement (elle semble sous estimée ici pour la période récente — C.F.
tableau 1 —), celle du charbon, sur une lancée datant de la seconde moitié du
XVIII ème siècle, devenait prépondérante vers 1880, situation qui devait
perdurer jusqu’en 1970. Nous sommes maintenant en plein dans l’ère des
hydrocarbures dont le modèle prévoit qu’elle pourrait s’étendre sur la plus
grande partie du XXI ème siècle. La part du pétrole atteint la saturation après
un siècle de croissance. Celle du gaz, le plus écologique des combustibles
chimiques, apparaît destinée à grandir encore. La part du nucléaire sort de la
marginalité vers 1970 et ne dépasse pas en cette fin de siècle 5% du
total.
A long terme et rapportées à
l’ensemble de la planète, les crises ne semblent pas avoir eu d’influence autre
que faible et temporaire. C’est encore plus vrai des protestations à l’encontre
de telle ou telle technologie. L’histoire semble montrer que les clameurs des
opposants ne concourent qu’au développement (nécessaire) de mesures de sécurité.
Il y a lieu, toutefois, de remarquer que ce qui a été vrai jusqu’à présent est,
peut-être, sur le point de devenir faux. En effet la sensibilité aux problèmes
environnementaux devient un facteur de décision politique et économique. Un
exemple récent en a été donné par la réduction imposée de l’utilisation des CFC.
Un processus analogue semble se mettre en place en ce qui concerne l’émission de
gaz à effets de serre. Les enjeux économiques sont, ici, tels, qu’il n’est pas
sûr que la logique économique ne l’emportera pas sur la logique écologique. De
même est-il possible que l’humanité renonce à l’énergie nucléaire pour des
raisons environnementales, justifiées ou non. Dès maintenant les considérations
environnementales ont conduit à des surcoûts importants pour les centrales
nucléaires. La pression des opposants au nucléaire a, également, interdit
l’utilisation des fonds marins pour le stockage des déchets nucléaires, alors
que pour la majorité des experts, l’enfouissement des déchets dans le socle
océanique, de part et d’autre des médianes serait la méthode la plus
sûre.
Les chercheurs de l’I.I.A.S.A. ont pu
établir une corrélation avec les cycles de Kondratiev, alternances de forte
croissance et de récession relative dont la période est d’environ 55 ans.
L’influence de ces cycles serait tellement grande selon C. Marchetti [4] que cet
auteur est enclin à situer la saturation d’une pénétration diffusive aux points
bas des cycles de Kondratiev, soit pour les périodes les plus récentes autour de
1940 et de 1995.
Les modèles diffusifs de
l’I.I.A.S.A. ne prennent pas en compte l’éventualité d’un épuisement des
réserves de combustibles fossiles. Où est donc passée cette épée de Damoclès
qu’en 1972 le Club de Rome voyait suspendue au-dessus de nos têtes
?
Elaboré avec l’aide d’un modèle numérique conçu au M.I.T., le rapport du club de Rome [5] qui en son temps fit tant de bruit, envisageait différents scénarios à partir des tendances de l’époque : doublement de la consommation d’énergie tous les 10 ans, fort accroissement de la population. Dans tous les cas, la raréfaction des combustibles conduisait vers l’an 2025 à un effondrement économique planétaire.
Contrairement à une théorie physique, un modèle s’avère peu prédictif. Il ne vaut que ce que valent les hypothèses sur lesquelles il est bâti, surtout lorsqu'il est fermé, ce qui était le cas dans les simulations développées pour le Club de Rome. Et il s'est passé des évènements extérieurs au modèle.
En 1973, eut lieu le premier choc pétrolier. Décision politique, le quadruplement brutal du prix du brut consécutif à la guerre du Kippour, a renforcé la crainte d’une pénurie d'énergie par épuisement des ressources. Un tel sentiment déjà apparu vingt ans plus tôt, c’était au début des années 50, valait justificatif des premiers développements de l’énergie nucléaire. Dans les deux cas il y eut erreur de diagnostic. Mais autant les trente glorieuses (1945-73) furent marquées par une frénésie de consommation d'énergie, le fameux doublement en dix ans, autant les années suivant 1973 sont celles de la stagnation, à des fluctuations près, sans que l'accroissement du P.I.B., cet indicateur du niveau de vie, en souffre gravement (figure 3[6]).
Figure 3.
Evolutions comparées du PIB et de la consommation d’énergie dans les pays de l’OCDE
(base 100 en 1973).
Sans le faire exprès, les dirigeants moyen-orientaux ont, en provoquant les chocs pétroliers, rendu un signalé service à l'humanité. Chez les plus gros consommateurs c.a.d. en Occident, on a depuis 1973 appris à mieux gérer l'énergie. Les responsables, les médias, les opinions publiques ont d'abord craint l'imminence d'une véritable pénurie : fausse alerte. Mais la crise a fait apparaître deux idées complémentaires :
i) il est possible de produire autant avec moins d'énergie ;
ii) du coup, les perspectives d'épuisement des réserves de pétrole s'estompent.
Cette prise de conscience n'a eu lieu que dans les démocraties à l'occidentale, riches, voraces en énergie mais où une opinion lucide a plus de chances qu'ailleurs d'être entendue. Hors de cet ensemble restreint, les statistiques montrent que la crise de 1973 n'a pas eu d'influence sur la croissance de la consommation d'énergie.
Il est à noter que le coup d'éclat de 1973 n’a pas été un véritable déclencheur. Il a plutôt renforcé brutalement une tendance lourde et déjà inscrite dans les faits comme en témoigne l'évolution du nombre annuel de découvertes de gisements pétroliers nouveaux qui a culminé en 1970 pour se stabiliser ensuite à un niveau 3 fois moindre. Etait-ce l’amorce d’un effet de pénurie ou un rééquilibrage de la production sur la consommation ? Sur ce point, les experts, géologues ou économistes, sont divisés.
Dans un article récent, deux géologues,
Colin Campbell et Jean Lahérrère [3] penchent pour la première hypothèse. Ils
annoncent pour bientôt la fin du pétrole bon marché faute de réserves
suffisantes. Leur analyse est fondée sur l’historique d’un gisement. Il s’écoule
environ 15 ans entre la découverte et l’instant où la moitié du contenu
exploitable a été extraite. Appliqué à l’ensemble du Monde moins le Moyen
Orient, l’ajustement de la production (lissée) à l’historique connu des
découvertes produit le peu encourageant graphique de la figure 4 :
Selon Campbell et Lahérrère, le ralentissement du rythme des découvertes est dû à la rareté des gisements encore à trouver plutôt qu’à un ralentissement de la prospection. La situation au Moyen Orient où se trouveraient plus de la moitié des réserves prouvées, ne s’avérerait en réalité guère plus brillante avec une perspective de déclin de la production à partir de 2010. Ainsi non seulement la part de marché du pétrole est appelée à décroître au cours du prochain demi-siècle comme le prévoit l’I.I.A.S.A., mais il en serait de même de la production en valeur absolue. Les réserves de gaz surpassent celles de pétrole mais pas au point de retarder les échéances de plus d’un demi siècle.
Les méthodes modernes de recherche et d’exploitation des gisements pétroliers pourraient reculer encore l’échéance. En ce qui concerne la découverte de gisements, il s’agit, d’une part, d’une amélioration des techniques d’imagerie sonique et ultrasonique, d’autre part, de l’utilisation des très faibles variations de la gravité. En particulier, ces techniques raffinées permettraient de localiser des gisements profonds sous-océaniques. Les nouvelles méthodes de forage associent une analyse en ligne des terrains rencontrés par la tête de forage au cours de sa progression à la mise en œuvre de têtes de forage autonomes utilisant des moteurs à boue. Les forages horizontaux sont devenus possibles, ce qui permet de réduire considérablement le nombre de puits verticaux. Ces techniques devraient permettre une augmentation importante, jusqu’à 50%, du taux de récupération du pétrole des gisements. Elles permettront aussi l’exploitation des fonds océaniques jusqu’à environ 3000 mètres de profondeur, augmentant ainsi de près de 50 millions de km2 la surface à explorer. Les réserves exploitables d’hydrocarbures pourraient alors être doublées, au prix d’une augmentation importante des coûts et du risque de catastrophe écologique dans le cas de rupture de canalisation profonde.
On estime que la quantité de pétrole présente dans les schistes bitumineux et les sables asphaltés serait de plusieurs centaines de milliards de tonnes. Déjà le Canada produit plusieurs millions de tonnes de pétrole extraits de sables asphaltés de façon rentable. Les problèmes écologiques entraînés par cette exploitation sont considérables : énormes tonnages de sol à remuer, traitement délicat des effluents liquides de traitement des sables.
D’énormes quantités de méthane sont stockées sous forme d’hydrates, les clathrates, soit dans le permafrost, soit au pied du plateau continental. La quantité de Carbonne présente dans ces hydrates est estimée au double de celle présente dans les gisements connus de charbon, de pétrole et de gaz. Le prélèvement des hydrates océaniques ne semble pas devoir être très difficile. Il présente, toutefois, deux risques écologiques sérieux :
Il faut prendre aussi en compte
l’évolution de la demande en énergie au niveau mondial. Les projections
prévoient un accroissement de la population mondiale de 6 milliards d’individus
actuellement pour se stabiliser autour de 10 milliards au cours du XXI me
siècle[7]. Une grande partie de cette population se trouve dans des pays en
émergence comme la Chine et l’Inde dont la demande en énergie ne restera pas à
son niveau actuel (tableau 2). Ceci aura forcément une incidence sur
l’évaluation des réserves même si les pays les plus gourmands actuellement
parvenaient à réduire d’un facteur 2 leur consommation.
Le vrai problème est de savoir dans
quelle mesure et dans quel sens l’activité humaine perturbe notre environnement.
La prise de conscience de tels effets est récente et comme pour les économies
d’énergie induites par la crise pétrolière des années 70, elle est semble-t-il
limitée aux nations les plus développées, suffisamment riches pour avoir des
soucis que l’opinion publique de plus pauvres rangerait au chapitre du luxe. En
ce qui concerne l’énergie, on connaît deux grandes catégories de nuisances qui
ne sont pas indépendantes mais se distinguent par leur constante de temps. Il
existe des effet immédiats : dégradation de sites et pollutions (rejets,
déchets). D’autres sont à long terme : contribution possible à des modifications
climatiques à l’échelle de la planète (gaz à effets de serre). Il est désormais
admis que ces atteintes à l’environnement doivent être minimisées.
Variations de la température (en moyenne annuelle) depuis les débuts de l’ère industrielle
Nous sommes actuellement dans une période où la température moyenne de la planète ne cesse de monter. La température de l'air, en valeur moyenne est au moins aussi élevée qu'elle ne l'a été à toute autre époque entre 1400 et la période présente. La question se pose de savoir si cette élévation de température est liée aux activités humaines[8] comme semblerait le montrer la figure 5 qui retrace l'évolution de la température moyenne depuis les débuts de l'ère industrielle. Cependant notre capacité à mesurer l'influence de l'homme sur le climat global reste limitée. En effet la reconstitution des climats du passé conduit à montrer l'existence de phénomènes cycliques en relation avec les mouvements de la terre : modifications de l'excentricité de sa trajectoire, de l'obliquité de son axe de rotation, de mouvements de précession autour de son axe. Quant à l'effet de serre, il a toujours existé. Sans effet de serre la température moyenne serait de -18 degrés C alors qu'elle est actuellement de +15 degrés C, les principaux gaz à effet de serre étant la vapeur d'eau, le gaz carbonique, le méthane, l'oxyde d'azote, les chlorofluorocarbones (CFC), l'ozone troposphérique.
Cependant la concentration de ces gaz dans l'atmosphère augmente régulièrement et suit l'évolution de la population comme le montre la figure 6.
Figure 6.
Evolution des émissions des gaz à effet de serre et de la population
Le scénario le moins contraignant conduirait, à la fin du siècle prochain, à un triplement de la concentration en gaz carbonique par rapport à sa valeur préindustrielle de 380 ppmv (parties par million en volume). Il faut aussi noter que, même si l’effort est fait d’un maintien des émissions à leur niveau actuel (aux environs de 6 milliards de tonnes de carbone), les concentrations auront néanmoins presque doublé. On ne peut exclure que cette augmentation de gaz à effet de serre ne conduise à échéance àun changement climatique important : sans pouvoir prédire exactement ce qui va se passer on peut cependant s’attendre à une augmentation du nombre et de la puissance des cyclones, désertification de zones subtropicales, inondations de certains pays (Pays Bas, Bangladesh), dégradation des terres par érosion, déviation du Gulf Stream permettant à la masse d'air polaire de parvenir sur l'Europe occidentale. Les discussions qui ont eu lieu à Kyoto ont mis en lumière ce rôle potentiel des activités humaines sur le climat.
La quantité de dioxyde de carbone (CO2) émise en 1990 s’élevait à 22 Giga Tonnes. La répartition géographique de cette pollution et de quelques autres est présentée sur le tableau 4 [1]. La comparaison des émissions selon les différents pays est également instructive (figure 7 [9] et tableau 5 [10]). Elle indique l’effort que doit faire chacun pour améliorer la situation.
Tableau 4.
Taux d’émission de différents polluants par zone géographique
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Dans les pays qui ont un taux d’émission de CO2 supérieur à 10 tonnes par habitant la production d’électricité utilise principalement des combustibles fossiles. La plupart des autres pays développés comme la Suisse et les pays nordiques ont de vastes ressources hydroélectriques. La France se singularise par un emploi important de l’énergie nucléaire tandis qu’au Japon la part du charbon est faible dans le total des combustibles fossiles consommés. La faiblesse des émissions en provenance de la Chine et de l’Inde est un reflet de leur état de développement comme le montre la figure7. Une dernière remarque : une part importante des émissions de gaz à effet de serre provient des systèmes de transport.
Figure 7
Tableau 5.
Emission par habitant des polluants principaux selon différents pays
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(kilos/habitant) |
(kilos/habitant) | |
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Alors que le CO2 est essentiellement un
gaz à effet de serre, les émissions de Soufre et d’Azote entraînent les pluies
acides et une formation d’ozone atmosphérique. Les trois principaux combustibles
fossiles, charbon, gaz et pétrole, ont des taux d’émission de gaz à effet de
serre différents comme le montre le tableau 6 [10].
Tableau 6.
Comparaison des taux d’émission de polluants par différentes technologies.
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Dans ce tableau les modes de production indiqués en cogénération supposent, également, l’utilisation de cycles combinés (voir ci-dessous). On peut voir aussi que l’utilisation de ces modes de production réduit de façon significative (un petit facteur 2) les taux d’émission.
L’effet de serre n’est pas la seule contrainte à prendre en compte. Toute activité à l’échelle d’une société humaine se doit de rendre un réel service, donc répondre à des besoins qui sont de nos jours immenses (contrainte de réponse à une demande sociale). Un souci de pérennité impose que cette activité soit menée de façon rentable (contrainte économique). Ajoutant la contrainte environnementale, on est en face d’une trinité indissociable. Ces contraintes sont chacune exclusives des deux autres.
Seule façon de contribuer à ce qu’il est convenu d’appeler un développement durable, la mise en œuvre des sources d’énergie doit se plier simultanément aux 3 contraintes dans un jeu qui ne doit pas être à somme constante. Aucune ne doit être privilégiée. Aucune ne doit être négligée, ce qui fut longtemps le cas de l’environnementale. Souvenons-nous des débuts de l’industrialisation : ils furent conduits dans le cadre d’un capitalisme assez sauvage tandis que les fumées envahissaient le ciel des zones usinières, les noyant parfois de vapeurs suffocantes. Le légendaire "smog" londonien n’avait pas d’autre cause. L’amélioration générale du niveau de vie a d’abord suscité des désirs d’atmosphère respirable et d’eau limpide. Le souci de préserver l’environnement est devenu médiatique au cours des 30 dernières années. Dans ce domaine encore les analyses de Marchetti reprises par Ausubel [11] sont riches d’informations.
En particulier le basculement d’une source d’énergie dominante à une autre, du bois vers le charbon puis le pétrole, enfin le gaz (figure 2), s’accompagne d’une réduction relative de l’émission de gaz à effet de serre. En effet à chaque fois la substitution se fait d’un combustible plus riche en carbone vers un combustible plus riche en hydrogène. Le produit de combustion est de plus en plus l’eau (écologiquement neutre) au détriment du gaz carbonique (dioxyde de carbone, origine prouvée d’un effet de serre). Comme le montre la figure 8, la tendance est à la hausse du rapport hydrogène sur carbone. Au début du prochain siècle, la courbe s’infléchira vers la limite correspondant au méthane, 4 hydrogènes pour un carbone, à moins que l’on réussisse à utiliser de façon économiquement rentable de l’hydrogène d’origine autre que fossile.
Ainsi, insensiblement et sans démarche
explicitement volontariste, nos sources d’énergie tendent à mieux respecter
l’environnement.
L’intérêt de certaines sources
d’énergies renouvelables réside dans le fait qu’elles sont dépourvues d’émission
de gaz à effet de serre. et ne génèrent pas de déchets plus qu’encombrants pour
les générations futures. Elles permettent en outre de préserver les réserves de
combustibles fossiles pour lesquels on pourrait espérer un usage plus noble que
d’être brûlés.
Le rayonnement solaire correspond
sensiblement au rayonnement du corps noir. L’énergie reçue au sol, après
traversée de l’atmosphère, est de 1kW/m2 pour une surface exposée
perpendiculairement aux rayons du soleil. Cette puissance n’est évidemment pas
utilisable en continu : il n’y a pas de soleil la nuit, et même pendant la
journée, suivant les régions et les saisons, il peut y avoir plus ou moins de
nuages. En outre le capteur ne reste pas en permanence perpendiculaire aux
rayons solaires, sauf systèmes mécaniques compliqués et coûteux. Pour la France,
l’énergie moyenne d’ensoleillement varie de un peu plus de 1200 kWh/m2/an dans
le Nord à un peu moins de 1800 sur la côte d’azur, ce qui fait moins d’un
rapport 1,5 entre les deux extrêmes. A l’échelle mondiale, on constate qu’il y a
moins d’un rapport 3 entre les régions les plus ensoleillées de la planète et
nos régions d’Europe. Même en valeur moyenne il y a du soleil pour tout le
monde.
Dans le cadre
d’économies d’énergie il est intéressant de produire son eau chaude en utilisant
le rayonnement solaire. L’installation est des plus simple : l’alimentation en
eau froide est connectée à un collecteur placé sur le toit de la maison. Ce
genre d’installation est largement répandu dans le sud de la Californie où il
permet de fournir en eau chaude portée à 60 degrés à peu près 70% de la
consommation d’une famille. En fonction de la surface
des capteurs, l’eau chaude peut être utilisée soit pour les besoins domestiques
proprement dits, soit, également, pour le chauffage. Le chauffage solaire est
d’autant plus efficace que l’architecture est adaptée : utilisation directe de
l’insolation par orientation judicieuse des surfaces vitrées, isolation,
stockage de la chaleur (murs de Trombe). Par contre, dans les installations
individuelles, pour la production d’électricité, on utilise plutôt la conversion
photovoltaïque.
La production d’électricité à partir de la lumière
est réalisée par création de charges libres dans un semi-conducteur par
absorption d’un photon. C’est un effet purement quantique : si le photon a une
énergie suffisante, il peut faire passer un électron de la bande de valence du
semi-conducteur vers la bande de conduction. Cependant la photoconductivité ne
suffit pas. Pour éviter la recombinaison des ions et des électrons ainsi créés,
il faut les séparer grâce à un champ électrique. Celui ci est réalisé à la
jonction de deux matériaux ayant des potentiels chimiques différents ( jonction
n-p). Un courant électrique apparaît alors aux bornes de la jonction n-p quand
ce dispositif est exposé à la lumière. Ce dernier ne comporte pas de pièces
mobiles, pas de liquide, ne s’use pas et sa longévité se chiffre en dizaines
d’années.
Le rendement de cette conversion photo-électrique est évidemment inférieur à 1 :
La fabrication est très semblable à celle utilisée
pour l’électronique. Il faut partir de silicium très pur, contenant moins de 100
parties par milliard d’impuretés, obtenu par fusion de zone, technique en
pratique très lente, chère et consommatrice d’énergie. Pour des raisons
économiques, le tirage d’un monocristal tend à être remplacé par le coulage de
gros lingots poly cristallins à gros grains. Le rendement des cellules est
légèrement inférieur mais largement rattrapé par une forme plus favorable
(carrés au lieu de ronds) pour la fabrication de panneaux de grandes
dimensions.
Il faut scier les lingots de silicium, matériau très dur, en plaquettes de 150 à 200 microns d’épaisseur, à l’aide de scies à fil très performantes, mais le processus est lent et fait perdre 50% de ce matériau très cher. La réalisation de la jonction n-p n’est pas triviale : il faut doper le silicium à haute température. Il faut aussi mettre des électrodes. Il faut enfin assembler ces cellules élémentaires en un panneau utilisable. La manipulation en grande quantité de plaquettes minces et très fragiles qu’il faut assembler, mettre en série et encapsuler pour éviter les agressions extérieures, est un processus qui pèse pour un tiers dans le prix de revient du panneau.
Les panneaux ainsi réalisés sont des produits
remarquables, certains fonctionnent depuis plus de trente ans. Mais le prix de
revient de ce produit de haute technicité est élevé. Le prix actuel, pour une
commande importante, est de 4500F(700 Euros) par m2 de panneau. Si on considère
le cas de la France où l’énergie solaire moyenne reçue est de 1500 kWh/m2 par
an, le rendement des panneaux étant de 13%, pour un investissement sur 20 ans on
trouve un prix de revient du kWh de l’ordre de 1,33F(0.2 Euros), sans tenir
compte du taux d’intérêt de rémunération du capital investi et sans tenir compte
du prix d’un stockage si on veut disposer d’électricité de façon
continue.
Il s’agit de panneaux solaires obtenus par dépôt de
couches minces d’épaisseur de l’ordre du micron de matériaux semiconducteurs sur
un substrat approprié. Plusieurs techniques sont actuellement en plein
développement. Bien que moins avancées au point de vue industriel que les
filières cristallines, les filières en couches minces présentent des avantages
considérables :
Les semi-conducteurs constitués de matériaux I-VI, du type CdTe, absorbent fortement la lumière et permettent la fabrication de dispositifs photovoltaïque en couche mince. Les performances ont très bonnes avec un rendement de l'ordre de 13%. Une des difficultés qui ralentit la production industrielle de ce type de panneaux est une certaine sensibilité à l'humidité. Pour une bonne durée de vie, les couches minces doivent être bien protégées par une encapsulation de qualité.Couches minces de composés II-VI
Caractéristiques des différentes filièresTableau 7
filière | Nature | Rendement
En laboratoire |
Rendement
Des panneaux |
PRIX |
GaAS | Cristallin | 27% | 22% | Très élevé |
silicium | Cristallin | 19% | 14% | Elevé |
silicium | Poly cristallin | 16% | 13% | Moyen |
Silicium amorphe | Couche mince | 11% | 7% | Bon marché |
Composés II-IV | Couche mince | 13% | ? | Bon marché |
multicouches | Couches minces | 15% | ? | Moyen |
Pour donner une idée, la surface au
sol nécessaire pour produire une quantité d’électricité équivalente à celle
d’une centrale nucléaire ou thermique de 1GW serait de 26 km2. C’est une surface
importante mais sans autre incidence sur l’environnement.
Certaines filières peuvent contenir des éléments dangereux comme du cadmium ou de l’arsenic. Comme il s’agit de matériaux en couches minces, la quantité de matière est faible et de plus les composés sont très stables. Le danger de dissémination des matières dangereusement est pratiquement nul.
La production de matériaux photovoltaïques peut mettre en jeu des produits polluants gazeux comme chlore, arsine, phosphine, silane. Mais il s'agit d'une industrie très proche des techniques de production de la micro-électronique où les problèmes de pollution sont particulièrement bien rodés et contrôlés.
A l'heure actuelle, pour une production centralisée, l'électricité d'origine photovoltaïque aurait un coût beaucoup plus élevé que celle produite par l'électronucléaire ou à partir des carburants fossiles. Le prix du kWh photovoltaïque ne fait que baisser. On ne peut pas dire actuellement s'il deviendra compétitif avec les autres sources d'énergie. Cependant si c'est le cas, d'après ce qu'on a vu précédemment , il faudra encore attendre une bonne trentaine d'années pour avoir alors une pénétration du marché de l'ordre de 10 à 20%. Par contre, pour des endroits isolés et pour des pays à faible densité de population, là où il n'est pas rentable d'établir un réseau, l'énergie solaire est compétitive.
Ø L’impact environnemental des nouveaux barrages peut être considérable sur les climat et écosystème locaux. Il peut être nécessaire de déplacer des populations considérables (1,5 millions, par exemple, dans le cas du barrage des Trois Gorges). Ce dernier facteur est, probablement, le plus limitatif.
Ø Les risques de ruptures de barrages peuvent donner lieu à des catastrophes tout à fait comparables à Tchernobyl (30000 morts, par exemple, en Inde, en 1979, lors de la rupture du barrage de Morvi).
La production d’énergie issue de la biomasse s’élève aujourd’hui à quelque 70 GTep/an. Les hommes utilisent environ 6% de cette production soit pour produire de la nourriture (2 GTep/an) soit pour produire de l’énergie (1 GTep). Dans les scénarios les plus favorables à l’utilisation de la biomasse présentés à la conférence de Rio en 1992, la production d’énergie correspondante pourrait s’élever à 5 GTep soit 40% des 13 GTep représentant le total de la consommation humaine. Ce type de scénario implique un renversement de la tendance séculaire à la diminution de la part de marché dévolue au bois telle qu’elle est représentée sur la figure 2.
En raison du volume physique qu’elle occupe la biomasse doit être transformée sur son lieu de production en combustibles à haute teneur énergétique. En plus des usages locaux on prévoit d’en extraire du gaz (méthane) de l’alcool (éthanol, ETBE) ou encore d’huile végétale estérifiée. Mais ils sont actuellement trois fois plus chers que les carburants fossiles. Il faut 1 litre de carburant fossile pour produire 1,5 litres de bio-éthanol, remplaçant éventuel de l’essence ou 2 litres d’ester de colza, remplaçant éventuel du gazole.
Dans la combustion du bois, le rapport hydrogène/carbone est défavorable. Cependant le retour à ce combustible préconisé par certains écologistes serait justifié par la réabsorption lors la reconstitution de la forêt, de la totalité du C02 produit. Outre que la cinétique du processus pourrait réserver des surprises, il convient de rappeler que l’utilisation intensive du bois de chauffage avait aux XVII ème et XVIII ème siècles entraîné en France et en Grande Bretagne une déforestation massive.
En France le potentiel de production est estimé à 66 TWh/an pour des moulins établis sur la terre ferme, et 95 TWh/an pour des implantations au large. Ce dernier chiffre représente approximativement la production de 20 réacteurs nucléaires (il en existe actuellement 55). Pour l’atteindre, il faudrait 100 000 éoliennes de grande puissance avec une densité d’implantation de 20 fermes par kilomètre de côte. C’est techniquement faisable mais la partie économiquement compétitive de ce potentiel est évidemment bien moindre et dépend des contraintes d’environnement : implantation impossible dans des sites cotiers touristiques, nuisance sonore, destruction d’oiseaux. De plus le vent est intermittent. La compétitivité est de la sorte liée au raccordement à un réseau. Elle n’est que marginale pour les meilleurs sites.
Une autre solution est d’effectuer l’électrolyse de l’eau et de stocker l’hydrogène. On récupère ensuite l’énergie en produisant de l’eau avec des piles à combustible.
On pourrait envisager de l'utiliser dans les transports terrestres et aériens, résolvant ainsi complètement le problème de la pollution puisque sa combustion ne produit que de l'eau, et, éventuellement, des oxydes d’azote si la combustion a lieu dans l’air à haute température.
Le transport de l'hydrogène ne nécessite
que des tuyaux et peut se faire pratiquement sans perte contrairement au
transport d'électricité par fils. L'électricité peut être ensuite produite sur
place en utilisant des piles à combustible. L'utilisation de l'hydrogène peut
être un facteur important d'économie d'énergie
La pile à combustible diffère de la batterie
traditionnelle. Dans cette dernière, l'énergie électrique est transformée en
énergie chimique. Le phénomène est réversible. Quand la batterie est déchargée,
elle doit être rechargée en apportant de l’énergie électrique. Dans une centrale
thermique, l’électricité est produite par transformation de la chaleur provenant
de la combustion du carburant Dans la pile à combustible les composants restent
intacts, le carburant est converti directement sans combustion par réaction
électrochimique. Il existe actuellement cinq filières en cours de développement
:
On considèrera à titre d’exemple la pile à membrane
échangeuse de protons . Elle est composée d’une part d’électrodes activées
catalytiquement pour le carburant sur l’anode et pour l'oxydant sur la cathode ,
d’autre part d’un électrolyte pour conduire les ions entre les deux anodes. Le
carburant est de l'hydrogène ou un hydrocarbure riche en hydrogène comme le
méthanol ou du gaz naturel, et l'oxydant l'oxygène de l'air. L'hydrogène, au
niveau de l'anode, est ionisé en proton et électron par le catalyseur. Les
protons transitent de l’anode vers la cathode où ils se combinent à l'oxygène de
l’air pour donner de l'eau. Les électrons rejoignent la cathode en transitant
par un circuit externe produisant ainsi de l’énergie électrique. La figure 10
représente le principe d’une pile à membrane
Figure 10
Cathode : 4e- + 4H+ + O2 ® 2H2O
Bilan total : 2H2 + O2 ® 2H2O
Les piles à combustible produisent de l'énergie avec
une efficacité très supérieure aux systèmes conventionnels. On s'attend à une
conversion en énergie deux à trois fois meilleure. Elles peuvent avoir n'importe
quelle dimension, pouvant aussi bien être placées dans une petite voiture que
générer l'électricité nécessaire pour alimenter une ville. La pile à combustible
permet de convertir le carburant en électricité sans dégradation de
l'environnement. Elle est susceptible d’associer l'intérêt des véhicules
électriques avec la capacité d'une grande autonomie et d'un rapide
réapprovisionnement en carburant.
Leur taux d'émission est nul ou très faible selon le carburant
utilisé :
. Les combustibles peuvent être des combustibles fossiles, des bio-alcool et l’hydrogène. L’utilisation des combustibles fossiles conduit, évidemment, au rejet de dioxyde de carbone. Si les alcools, éthanol ou méthanol, sont d’origine biologique, les rejets nets de dioxyde de carbone pourraient être inexistants. Les piles utilisant l'hydrogène émettent seulement de la vapeur d'eau et de l'azote. En particulier les véhicules utilisant ce système seraient parfaitement propres. L’hydrogène est donc le carburant idéal, mais il demande à être produit par électrolyse et est délicat à stocker.
Le carburant peut éventuellement être produit localement L'hydrogène peut être fabriqué à partir d'électricité provenant de ressources nucléaires ou renouvelables( éoliennes, batteries solaires ou biomasse). Actuellement seuls les combustibles fossiles peuvent permettre d’atteindre la compétitivité économique, pour les piles à combustibles.
Les développements actuels
En Europe, au Japon et aux USA, plusieurs filières font
l'objet d'importants efforts de R et D, et même de développements industriels.
On peut d'ores et déjà trouver sur le marché des unités de production entre 20
et 200 kWe développées par des acteurs industriels de poids comme Westinghouse,
Siemens, ... Les piles à acide phosphorique font l’objet d’une commercialisation
pour des productions atteignant 200 kWe et 220 kWth ( pile PC25 de ONSI ), des
piles à oxydes solides fonctionnant avec du gaz naturel sont commercialisées aux
USA et en Europe. Quant aux piles à membrane échangeuses de protons, elles font
l’objet d’études en vue d’application aux véhicules électriques par de nombreux
constructeurs : Renault, Peugeot, Nissan, Toyota, Daimler-Benz, Ford, GM…
L'Europe paraît bien positionnée pour les piles de la prochaine génération sur
lesquelles des efforts sont faits pour poursuivre l'abaissement des
coûts.
Il est coutumier de dire qu’un
kilowattheure économisé coûte beaucoup moins cher qu’un kilowattheure consommé,
ou, encore, que les " négawatts " sont moins chers que les mégawatts. Ces
maximes sont, certes, judicieuses s’il s’agit d’inciter chacun à utiliser
l’énergie de façon responsable. Il ne faut, toutefois, pas les pousser trop loin
au point de renoncer, en même temps qu’à l’énergie, aux services de tous ordres
qu’elle rend. Comme nous l’avons vu, et comme nous pouvons le voir sur la figure
3, à la suite du choc pétrolier de 1973 l’énergie a été utilisée de manière
beaucoup plus efficace. Des progrès sont encore possibles comme la
généralisation des ampoules à faible consommation, l’amélioration de l’isolation
thermique des bâtiments etc. Des gains considérables peuvent être attendus par
l’utilisation de microprocesseurs optimisant les processus eu égard à la
consommation d’énergie. De tels dispositifs jouent dès à présent un rôle dans
l’amélioration du rendement des moteurs à explosion, par exemple. Nous avons vu
que des gains importants sur les rendements de conversion en électricité ont été
obtenus avec les turbines à cycle combiné et par l’emploi de la co-génération.
L’utilisation de l’hydrogène pour le stockage de l’électricité et son transport
peut aussi être un facteur important d’économie.
Dans les centrales thermiques on
obtient traditionnellement l'électricité en faisant tourner des turbines avec de
la vapeur produite par une source de chaleur alimentée soit en brûlant un
combustible fossile ou de la biomasse, soit par un réacteur nucléaire. Une
partie importante de l'énergie thermique produite est perdue, le rendement de
l'installation n'étant que de 35% au mieux( cycle de Carnot). Des progrès sur
les matériaux utilisés par l’industrie aérospatiale ont permis de réaliser des
turbines à gaz fonctionnant à haute température( environ 900 degrés C.). On a
donc conçu des turbines utilisant directement les gaz chauds résultant de la
combustion du gaz naturel. A la sortie de la turbine les gaz sont encore
suffisamment chauds pour réchauffer de la vapeur permettant de mettre en œuvre
une turbine à vapeur. L’association de la turbine à gaz et de la turbine à
vapeur constitue le cycle combiné. L’ensemble permet d’atteindre des rendements
de conversion en électricité de plus de 50%. La vapeur obtenue à la sortie de la
turbine à vapeur est encore suffisamment chaude pour être utilisée soit comme
source de chaleur industrielle, soit pour le chauffage des locaux. C’est ce
qu’on appelle la cogénération de chaleur et d’électricité. Le rendement global
atteint alors 85%. La cogénération est un élément intéressant pour une politique
d'économie d'énergie. Elle ne trouve toutefois sa pleine efficacité que si la
production de chaleur est constamment associée à celle d’électricité, ce qui
n’est pas le cas, par exemple, pour le chauffage de locaux qui ne se justifie
qu’en saison froide.
Il faut, pour être complet, signaler que
les turbines à cycle combiné peuvent également mettre en œuvre du gaz de
charbon. Il s’agirait là d’une manière très intéressante pour des pays comme la
Chine ou l’Inde d’utiliser leurs vastes réserves de charbon tout en limitant le
coût environnemental de cette pratique.
Dans un pays comme le nôtre, la
consommation d'électricité ne représente que 38% de la consommation totale
d'énergie. Une grande part de la consommation vient des transports qui
contribuent pour une large part à l'émission de gaz à effet de serre. Seuls les
trains électriques n'y contribuent pas, dans la mesure où l’électricité n’est
pas produite grâce à des combustibles fossiles. Une solution est de développer
d'une façon importante les transports en commun, en particulier dans les grandes
métropoles qui rassemblent la plus grande partie de la population, surtout dans
les pays développés. Les constructeurs automobiles tout comme les avionneurs ont
fait de leur côté des efforts importants pour réduire la consommation des
véhicules, et des progrès seront encore réalisés dans ce domaine. En ce qui
concerne la pollution résultant de la combustion des carburants, plusieurs
facteurs sont à considérer :
Ø La production d’oxydes d’azote et de produits de combustion incomplète (monoxyde de Carbonne par exemple) est réduite considérablement par l’usage de pots catalytiques. Ceux-ci sont efficaces pour tous les types de carburants. Ils sont plus difficiles à mettre en œuvre pour le gazole à cause de leur encrassement par les particules. Il faut toutefois noter que les pots catalytiques ne sont efficaces que lorsqu’ils atteignent une température suffisante, ce qui nécessite un parcours d’une dizaine de kilomètres. Ils n’ont donc guère d’effet sur la pollution urbaine, en particulier sur celle due à l’ozone résultant de la réduction des oxydes d’azote.
Ø La production de dioxyde de Carbone dépend essentiellement du rendement des moteurs. A cet égard les moteurs Diesel présentent de l’intérêt puisque leur rendement est supérieur à ceux des moteurs à essence ou à GPL.
Ø Le gazole se singularise par l’émission de particules, sources de pollutions visuelles, odorantes, et, surtout, causes probables, au même titre que les polluants gazeux, de cancers et d’allergies. Les dispositifs réduisant la taille des particules, s’ils réduisent clairement les pollutions visuelles, demandent à voir leur efficacité démontrée en ce qui concerne les effets cancérigènes et allergènes.
Ø Les
véhicules électriques réduisent considérablement les pollutions locales. Leur
impact sur la production de gaz à effet de serre dépend évidemment du mode de
production d’électricité. Le rayon d’action des véhicules électriques reste
malheureusement trop limité. Peut-être une solution se trouve-t-elle dans les
véhicules hybrides dont les prix sont cependant encore prohibitifs. C’est aussi
le cas des véhicules utilisant des piles à combustible.
Un réacteur de 3000 MW thermiques transformés en 1000 MW électriques avec une disponibilité de 80% produit annuellement 7 TWh. Il consomme 1 tonne d’isotopes fissiles pour fournir autant d’énergie que 2 millions de tonnes de pétrole. Des données plus précises sont rapportées dans le tableau 8 d’après [14] qui inventorie la composition des matériaux au chargement et au déchargement du réacteur
Tableau 8
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Pour dresser ce tableau on a fait
l’hypothèse d’un taux de " burn-up " de 33 GWjour/tonne
Tableau 9
Produits de fission à
vie longue
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(années) |
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(kg/an) |
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L’importance du problème des déchets apparaît sur le tableau 10 [14] où figurent les tonnages cumulés jusqu’en 1995 des combustibles utilisés dans les réacteurs des différents pays de l’O.C.D.E.
Avec la faible part de marché actuelle soit 4.5% de la production énergétique mondiale, l’inventaire du combustible usé se montera à 200 000 tonnes vers l’année 2020 soit 8 000 tonnes par an. Ce chiffre est à comparer avec la capacité annuelle de recyclage : 2 000 tonnes traitées pour l’essentiel par l’usine COGEMA de La Hague. Si la part de marché dévolue au nucléaire devait s’élever à 30%, valeur significative du point de vue de l’effet de serre, la production annuelle de combustibles usés s’élèverait à 40 000 tonnes. Pour apprécier les conséquences de cette valeur, il est intéressant de la comparer aux capacités d’enfouissement profond des déchets nucléaires, procédé actuellement en discussion. Prenons l’exemple du site américain de Yucca Mountain, qui passe pour être le seul site de stockage socialement acceptable sur le territoire des U.S.A. Il occuperait une superficie de 6 km2 avec un réseau en nid d’abeille de 100 km de tunnel [16]. Sa capacité serait de 70 000 tonnes pour un coût de 15 milliards de dollars. Il est clair que l’option de l’enfouissement a un sens dans la perspective d’une sortie du nucléaire au cours de la première moitié du prochain siècle (un petit nombre de sites du type de Yucca Mountain suffirait). Cette option est nettement plus problématique si l’énergie nucléaire est destinée au contraire à occuper une large part du marché.
Tableau 10
Données cumulées
relatives aux combustibles usés dans les réacteurs nucléaires
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GW électriques |
d’origine nucléaire |
usés |
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* estimations [15]
** ce tonnage anormalement élevé est du au fait que les réacteurs Canadiens utilisent de l’uranium naturel.
En plus de la question des déchets, le médiocre usage fait de l’uranium dans les actuels réacteurs thermiques a des conséquences sur la quantité de minerai qu’il convient d’extraire et sur le niveau des ressources. En l’absence de recyclage, chaque réacteur d’un GW électrique demande 200 tonnes annuelles d’uranium frais (ceci tient compte de l’enrichissement et de la consommation incomplète de 235U). Les minerais d’Uranium couramment exploités ont une teneur d’environ 0.25% [17]. Un réacteur d’un GW électrique demande donc l’extraction annuelle de 80 000 tonnes de minerai, à comparer aux 2 millions de tonnes de pétrole nécessaires à produire la même quantité d’énergie. Les résidus du traitement sont radioactifs, radioactivité due aux descendants de l’Uranium, notamment le Radon. L’émission de ce gaz se fait avec une longue période : 75 400 ans déterminés par la demi vie de son parent, le 230Th. Elle est plus abondante à partir des résidus qu’à partir du minerai brut qui joue le rôle de piège à Radon.
On estime les réserves d’Uranium à 15 millions de tonnes au coût d’extraction actuel. Avec une production globale de 350 GW électriques consommant chaque année 70 000 tonnes d’Uranium naturel, on en a pour 200 ans. Il n’y a pas donc de problème d’approvisionnement tant que la part de l’énergie nucléaire reste au niveau actuel sur le marché de l’énergie. Mais, comme dans le cas des déchets, si la part du nucléaire était amenée à croître jusqu’à 30%, les réserves se réduiraient à 40 ans, situation comparable à celle du pétrole. Il convient cependant de noter que l’eau de mer contient 4 milliards de tonnes d’Uranium avec une concentration de 3.2 parties par milliard. Il semble possible d’extraire l’Uranium pour un prix de revient 10 fois plus élevé que l’actuel. Il en résulterait une augmentation de 50% du prix de l’électricité produite.
Alors que le Plutonium présent dans les combustibles nucléaires usés est considéré comme un déchet de la filière PWR, c’est au contraire le matériau fissile de base des surgénérateurs. Alors, les déchets nucléaires se réduisent aux produits de fission à vie longue et aux actinides mineurs. En l’absence de transmutation, difficile et coûteuse pour 137Cs et 90Sr, il convient de prévoir une période de refroidissement de 300 ans qui couvre la décroissance de ces isotopes. Après quoi, la radio toxicité des résidus serait inférieure d’un ordre de grandeur au moins, à celle résultant du déchargement de réacteurs PWR produisant la même quantité d’énergie. Mais le retraitement étant la clé de la filière surgénératrice, la transmutation en est le complément naturel. Elle apparaît techniquement et économiquement faisable pour les actinides mineurs et les plus importants des produits de fission à vie longue. Les déchets seraient alors réduits aux pertes de retraitement. On annonce [18] des rendements de retraitement de 99.9% pour la récupération du Plutonium et de 99% pour celle des actinides mineurs. La radio toxicité des déchets serait ainsi réduite de plusieurs ordres de grandeur après quelques centaines d’années de refroidissement, rendant ainsi inutile le stockage de très longue durée.
Tandis que la fiabilité et la sûreté des réacteurs PWR ont été largement démontrées dans les pays industrialisés occidentaux et dans l’ex U.R.S.S. (où seule la filière RBMK à laquelle appartenait le réacteur de Tchernobyl pose véritablement problème), l’expérience acquise sur les surgénérateurs est limitée autant qu’ambiguë. Les surgénérateurs de loin les mieux connus sont à métal liquide. Presque tous ont utilisé du Sodium liquide comme agent de refroidissement. Les exceptions sont des réacteurs de sous-marins russes refroidis au plomb liquide. Il semble que le bilan des réacteurs russes comme BOR60, BN350 et BN 600, tous refroidis au Sodium, soit très positif. On ne saurait en dire autant du bilan des réacteurs construits en Occident. Le petit réacteur américain EBR2 a fonctionné de façon satisfaisante jusqu’à sa fermeture en 1995. Un autre réacteur américain, Enrico Fermi n’a jamais marché. Le petit réacteur français RAPSODIE a très bien fonctionné jusqu’à son arrêt définitif. Le réacteur de 250 MW électriques Phénix a marché de façon satisfaisante pendant dix ans jusqu’à ce que des fluctuations de réactivité inexpliquées entraînent sa fermeture. Il a été récemment remis en service à faible puissance en attendant des améliorations de sûreté. L’exploitation du grand réacteur de 1200 MW électriques Super Phénix a été contrariée par des fuites de Sodium et un imbroglio administrativo-juridique jusqu’à la décision de fermeture indéfinie[19][20]. Le réacteur japonais Monju souffre aussi de fuites de Sodium. Il semble que la conjugaison de mesures de sûreté de plus en plus contraignantes et de l’emploi de ce corps très réactif qu’est le Sodium liquide rend les conditions d’exploitation très difficiles.
En conclusion, alors que dans
l’hypothèse de l’extension de l’énergie nucléaire, l’intérêt des surgénérateurs
est évident, on ne peut considérer que les réacteurs à Sodium sont l’unique
solution. Il est donc important de développer des concepts alternatifs
susceptibles de former le " Nucléaire du futur ".
Si l’on considère que
l’enfouissement des combustibles irradiés n’est pas une solution satisfaisante
pour un nucléaire pérenne, le retraitement est un passage obligé. A cet égard la
France, avec l’usine de La Hague dispose d’un outil précieux.
D’autres solutions sont possibles mais demandent la mise au point et l’utilisation de nouveaux types de combustibles. Les recherches sur ces nouveaux combustibles et la qualification expérimentale des nouveaux cycles proposés sont à encourager. Il faudra, également, améliorer les techniques de retraitement pour réduire le volume des déchets B. La mise en œuvre industrielle systématique de ces améliorations risque, toutefois, d’obérer la rentabilité de la production d’électricité nucléaire. De tels surcoûts ne seraient acceptables que dans la mesure où la production d’électricité fossile se verrait imposer la gestion de ses rejets tels les émissions de gaz à effet de serre.
L’utilisation des nouveaux combustibles permettrait de stabiliser, voire de diminuer, le stock de Plutonium avec les REP, sans avoir recours aux réacteurs rapides. Par contre le stock d’actinides mineurs (Américium et Curium) continuerait à croître. L ‘incinération des Actinides Mineurs (A.M.) est un problème ardu à cause de leur très haute radio toxicité, d’une part, de leurs mauvaises propriétés neutroniques, d’autre part. Un consensus semble se faire pour que l’incinération des A.M. se fasse dans des réacteurs dédiés, qui pourraient, d’ailleurs, se situer sur le site de l’usine de retraitement. La faible sensibilité des réacteurs hybrides aux propriétés neutroniques (effet de température, neutrons retardés) des combustibles en fait des outils de choix pour l’incinération des A.M.
De ce qui précède il est clair que la
production massive de Plutonium dans les REP conduit à une stratégie compliquée
d’incinération des Actinides.
Avant de définir les grandes lignes
de ce que pourrait être le " Nucléaire du futur ", il convient de préciser ce
que l’on pourrait en attendre et les défis qu’il devrait relever :
Ø Une méthode satisfaisante et socialement acceptée de gestion des déchets. Comme nous l’avons déjà signalé la solution de l’enfouissement sans retraitement paraît difficilement envisageable dans le cas d’un nucléaire pérenne et généralisé.
Ø Une bonne utilisation de la ressource en Uranium ou Thorium. Il faudra sans doute, pour cela, recourir à des réacteurs régénérateurs ou surgénérateurs. La possibilité d’extraire l’Uranium de l’eau de mer fournira une référence économique à l’aune de laquelle l’intérêt des filières (sur)régénératrices pourra être évalué.
Ø La compétitivité par rapport aux autres modes de production d’électricité. L’évaluation de cette compétitivité doit faire l’objet d’une réflexion approfondie : doit-on privilégier un retour rapide d’investissement ou une rentabilité à long terme ? Comment intégrer les coûts externes dans les prix marchands ?
Le projet PIUS de réacteur à eau pressurisée, proposé par les Suédois prévoyait ainsi que, en cas d’augmentation anormale de la température de l’eau de refroidissement, le cœur du réacteur serait automatiquement noyé dans de l’eau borée (poison neutronique arrêtant la réaction en chaîne) provenant d’une très grande réserve d’eau dans laquelle le réacteur lui-même était plongé, et suffisante pour assurer l’évacuation de la chaleur résiduelle. Pratiquement les interventions de routine sur le réacteur seraient devenues si compliquées que le concept a été abandonné.
De leur côté, les réacteurs refroidis par du gaz (Hélium) à haute température (HTR) utilisent des combustibles réfractaires qui ont des températures de fusion tellement élevées que le refroidissement par radiation peut assurer qu’elles ne seront jamais atteintes. Ainsi la fusion du cœur devient-t-elle impossible. Il faut noter que ceci n’est vrai que pour des réacteurs de puissance limitée puisque l’énergie rayonnée est proportionnelle à la surface du réacteur alors que l’énergie produite est proportionnelle à son volume. Les prototypes de réacteurs qui ont été expérimentés aux USA et en Allemagne ont souffert de nombreuses pannes et cette filière a été abandonnée. Elle bénéficie toutefois d’un regain d’intérêt dans la perspective de brûler le Plutonium militaire. Il faut noter que, précisément à cause de leur grande stabilité chimique, les combustibles des réacteurs HTR sont très difficiles à retraiter, ce qui pourrait sérieusement limiter leur intérêt comme surrégénérateurs ou comme incinérateurs de déchets.
Sans retenir le principe d’une sûreté passive totale Westinghouse propose un réacteur PWR (AP600) de puissance limitée (600 MWe) dans lequel des mécanismes passifs permettraient de donner un temps suffisant pour l’intervention des opérateurs (plusieurs heures). Les simplifications dans le contrôle du réacteur devraient permettre, selon Westinghouse, de compenser le surcoût dû à la limitation de taille.
Dans les réacteurs actuellement exploités, il se crée à chaque instant autant de neutrons qu’il s’en perd ( k = 1). Cet état de criticité contrôlée n’est pas la seule façon de tirer de l’énergie de la fission nucléaire. Un assemblage sous critique avec un coefficient de multiplication k inférieur à 1 (0.98 p.ex.) peut aussi fournir de grandes quantités d’énergie à condition de disposer d’une source de neutrons adaptée pour maintenir un régime permanent. Une telle source est envisageable à partir de réactions nucléaires de spallation : lorsqu’on bombarde du plomb, par exemple, avec des protons de 1 GeV, les noyaux de la cible éclatent en une série de noyaux plus légers, accompagnés de protons et neutrons qui, à leur tour, provoquent des réactions nucléaires dans le plomb. Pour chaque proton incident, on rEuroeille ainsi environ 30 neutrons de 3 MeV. Ceux ci pénètrent alors dans un assemblage de matériaux fissiles, cœur d’un réacteur sous-critique, chaque neutron de spallation conduisant à un nombre grand mais fini de réactions de fission productrices d’énergie. Les rendements des accélérateurs modernes permettent de n’utiliser pour l’accélération des protons qu’une faible partie de l’énergie produite par le réacteur.
Le principal avantage des réacteurs hybrides, en ce qui concerne la sûreté, est que l’arrêt de l’accélérateur entraîne, ipso facto, l’arrêt de la réaction en chaîne. Il devrait être facile de réaliser des dispositifs d’arrêt automatique du faisceau au cas où le système se comporterait de façon pathologique (par exemple augmentation anormale de la température due à une panne du circuit de refroidissement). De plus la puissance maximum du réacteur est limitée par la puissance maximum du faisceau de protons. Il s’ensuit que la seule exigence de sûreté pour éviter toute fusion de cœur d’un réacteur hybride est d’assurer, en toutes circonstances, l’évacuation de la chaleur résiduelle due à la radioactivité du combustible irradié. Cette chaleur ne représente que le dixième, environ, de la puissance thermique nominale du réacteur. La taille des réacteurs hybrides étant limitée l’extraction de la chaleur résiduelle par convection naturelle, où, dans le cas d’éventuels réacteurs à gaz, par radiation ne devrait pas poser de problème insurmontable.
Les deux cycles envisageables pour la (sur)régénération du combustible sont les cycles 232Th-233U et 238U-239Pu. Dans le cas des réacteurs critiques surgénérateurs il est nécessaire d’assurer à la fois la criticité et la disponibilité d’un nombre de neutrons suffisant pour assurer la régénération des noyaux fissiles. Pratiquement seuls des réacteurs critiques rapides utilisant le cycle 238U-239Pu ont démontré leur potentiel de surgénération. Par construction, les réacteurs hybrides permettent de s’affranchir de la condition de criticité. Il est alors possible d’obtenir la surgénération pour le cycle 232Th-233U, aussi bien pour des réacteurs rapides que thermiques.
La différence de 6 unités de masse et de 2 unités de charge en moins pour l’Uranium 233 par rapport au Plutonium 239 conduit à une production d’actinides mineurs de plusieurs ordres de grandeur inférieure. De plus, les isotopes de l’Uranium ont des propriétés neutroniques beaucoup plus favorables que les isotopes de Plutonium. La figure 11 compare l’évolution dans le temps des radio toxicités dans trois cas :
2. Le cas d’un cycle Uranium-Plutonium avec retraitement complet (cas des RNR)
3. Le cas d’un cycle Thorium-Uranium
avec retraitement complet
C.Rubbia[22] a montré l’intérêt d’utiliser un spectre rapide aussi bien pour entretenir le cycle 232Th-233U que pour incinérer les actinides et transmuter les produits de fission à vie longue.
Deux voies principales sont explorées :
1- Si l’on désire obtenir un régime continu à la température élevée nécessaire à l’entretien de la réaction deutérium-tritium (DT), le nombre de particules par unité de volume doit être restreint à une valeur (basse à notre échelle) compatible avec la nécessité de maintenir la densité d’énergie inférieure à une limite imposée par la tenue des matériaux. Ce milieu doit être isolé de toute paroi au moyen d’un champ magnétique de configuration appropriée. Un tel état de la matière n’existe pas en permanence dans la Nature.
2- L’autre possibilité consiste à laisser s’emballer la réaction. Mais il faut alors réduire l’énergie (proportionnelle à la masse de combustible) libérée par chaque explosion de façon à ne rien détruire. Le fonctionnement est celui d’un moteur : compression du combustible (par exemple en se servant de lasers), allumage, explosion. On parle alors pudiquement de confinement inertiel.
Des programmes à caractère technique ont été lancés très tôt (années 50 pour le confinement magnétique). Ils ont surtout révélé un énorme manque de connaissances fondamentales en physique des plasmas, partiellement comblé après des décennies de travail. L’objectif était beaucoup plus lointain et d’accès difficile qu’on ne l’imaginait. Or il est peu courant pour des scientifiques occidentaux, physiciens ou ingénieurs, comme pour les décideurs, de se lancer dans des projets qui vont au-delà de leur carrière et même de leur existence terrestre. On a donc promis et attendu le résultat dans des délais incompatibles avec les obstacles à surmonter. La crédibilité générale de la fusion s’en trouve assez injustement affectée. En effet, comme le montre la figure 12, la progression au cours des années de la puissance libérée par la fusion DT dans les machines de la filière " Tokamak " se compare favorablement à l’évolution de la capacité mémoire des puces électroniques.
Figure 12.
Dans le même temps, autre remarquable exploit technique, la puissance des lasers pour la fusion inertielle était multipliée par 109 et leur énergie par 106. Pouvait-on faire mieux ? Actuellement, les programmes sont revus à la baisse. Malgré cela et peut être à cause de cela, les physiciens ont encore beaucoup à découvrir et à inventer. Si la fusion fait une apparition sur le marché de l’énergie ce ne sera pas avant la fin du prochain siècle.
L’utilisation de la réaction (D-T) aurait deux conséquences importantes pour les éventuels réacteurs à fusion :
1. Le tritium devra être synthétisé par la réaction 6Li+nÞa+t. De ce fait les réserves ne sont plus les énormes réserves de deutérium mais les réserves de 6Li. En terme de ressources énergétiques ultimes celles-ci sont comparables à celles en Uranium et Thorium.
2. La présence de Tritium dans le
réacteur et celle de flux de neutrons rapides très intenses feront des réacteurs
à fusion des installations nucléaires. Leur démantèlement sera très analogue à
celui des réacteurs à fission. Les risques de faibles rejets de gaz radioactifs
dans l’atmosphère seront du même ordre de grandeur que pour les réacteurs à
fission. Par contre les risques d’accident majeur susceptible de contaminer
gravement les populations seront inexistants. Les déchets radioactifs provenant
essentiellement de l’activation des éléments structurels ne devraient pas poser
de problèmes à long terme, sous réserve que les éléments de structure soient
choisis de manière appropriée, et que la régénération du tritium puisse se faire
sans faire appel à la fission.
. Quelle que soit la source,
l’énergie a un prix. Mais la diversité des besoins autant que des façons de les
satisfaire exclut toute approche globale. L’énergie que nous utilisons est
soumise à la contrainte économique de rentabilité. Une fourniture à perte au nom
d’une " éthique " du service public serait suicidaire pour la société. La
compétitivité se définit par rapport au prix d’équilibre qui s’établit sur un
marché donné. Toutefois, la société peut décider de produire une énergie plus
propre, quoique plus chère.
. Ainsi par exemple, comme chacun peut le constater sur sa facture de gaz et d’électricité, le prix de l’énergie distribuée aux particuliers ou aux entreprises représente un achat de combustible plus un service. Classiquement, le coût de l’énergie fournie au réseau par une source donnée se décompose en trois parts : investissements, exploitation, combustibles. L’importance respective de ces parts dépend de facteurs techniques et économiques mais aussi sociaux propres à chaque pays. La figure 13 où sont classées les données relatives à différents pays de l’O.C.D.E., illustre le propos [23].
On note qu’en France, d’une façon générale, les prix du kilowattheure (kWh) sont parmi les plus bas. C’est vrai en particulier pour celui fourni par les centrales nucléaires. Là, et c’est une singularité, l’investissement par kWh produit est remarquablement faible. Il faut y voir l’effet d’une forte standardisation permise par un programme volontariste et pérenne d’équipement en centrales nucléaires (garantissant l’indépendance énergétique du pays) confié à un organisme public puissant (certains parlent d’état dans l’état). Aucun autre pays n’a mis en œuvre un programme aussi vigoureux assorti d’un processus de décision centralisé. De telles conditions favorisent les économies d’échelle, diminuent les délais de construction (jusqu'à un facteur trois entre la France et les USA) et les frais financiers.
Dans ce tableau ne figure pas l’électricité d’origine hydraulique. Sa part de marché ne dépasse pas 10 à 15 % sauf au Québec (Canada) où c’est de loin la solution la moins chère favorisée par une ressource surabondante.
Figure 13.
La discussion précédente porte sur le coût d’une unité d’énergie. Cette référence est pertinente pour le cas envisagé de fourniture d’énergie à un réseau électrique dans un pays développé. En France le prix du kWh qui pour E.D.F. revient à 22 centimes(33 mEuros), est facturé 60 centimes(91 mEuros) à l’usager domestique.
Qui dans ces conditions, accepterait de payer le kilowattheure à un prix prohibitif : un million de francs par exemple ? Evidemment, personne.
Et pourtant ! Nous utilisons quotidiennement de nombreux appareils dont l’énergie est fournie par des piles jetées après usage. De tels générateurs débitent un nombre réduit de milliampères sous 1,5 volt pendant quelques heures. Leur contenu énergétique se compte en dizaines de joules. Un calcul simple à partir du prix de vente dans les boutiques et les supermarchés montre que, suivant les modèles, le coût pour l’usager du kWh fourni par une pile se situe entre des centaines de milliers de francs et plusieurs millions. Mais qu’importe, si la dépense est de quelques francs pour le service rendu.
Ainsi, lorsque le besoin est modeste, le prix de l’unité d’énergie n’est pas toujours pertinent. C’est par exemple le cas pour une installation isolée. Un kilowattheure bon marché n’a aucun intérêt pour le paysan africain éloigné de tout et qui veut équiper un puits d’un moteur électrique. Une alimentation par un générateur solaire peut être ici une solution adéquate.
Par contre, au prix actuel des cellules photovoltaïques, les investissements pour un générateur solaire produisant 7 TWh par an, s’élèveraient à 17 milliards de dollars soit plus de 10 fois le prix d’une centrale nucléaire de puissance équivalente (1 GW électrique). Le coût de l’électricité atteindrait 500 mEuros/kWh à comparer aux 50 mEuros /kWh du réacteur nucléaire. La conversion thermique du rayonnement solaire permet des coûts sensiblement inférieurs, au niveau de 120 mEuros/kWh, et pourrait devenir compétitive pour une production significative d’énergie en Afrique, en Inde et en Amérique du Sud à condition que le courant soit envoyé sur un réseau. En effet l’énergie solaire est par nature intermittente. Une régulation et un stockage augmenteraient encore les prix de revient. Rendre compétitive l’énergie solaire sur une grande échelle est une entreprise de longue haleine, solution qu’on ne voit guère déboucher avant 2040 [24]. C’est, toutefois, un développement très important puisqu’il est susceptible de répondre aux besoins énergétiques de nombreux pays en voie de développement dépourvus de réseau électrique généralisé.
La production d’électricité à partir du gaz extrait de la biomasse est marginalement compétitive si le coût de la biomasse est négligeable. Dans le cas contraire le coût de cette forme d’électricité est 3 fois celui obtenu à partir des combustibles fossiles.
Pour discuter l’avenir des différents modes de prodution d’énergie électrique, il est utile de comparer leur coût. Le tableau 11 regroupe des estimations en mEuros /kWh [25][26]. Ce tableau montre que seule parmi les renouvelables, l’énergie éolienne a atteint le stade de la compétitivité avec les combustibles fossiles et l’énergie nucléaire. Mais elle suppose l’absence de dispositifs de stockage autonome pour une fourniture directe au réseau de l’électricité produite par les éoliennes. La biomasse arrive aussi à être compétitive dans des conditions ne nécessitant pas de transport à longue distance. Dans l’avenir, l’énergie solaire pourrait atteindre la compétitivité dans des sites bien ensoleillés et là encore sans stockage.
Tableau 11
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(traditionnels) |
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(cycles combinés) |
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53 (Allemagne) |
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Le tableau 11 ne reflète, toutefois,
qu’un aspect de la comparaison entre les différents modes de production
d’électrcité. En effet, nous avons souligné, à plusieurs reprises, que le
recours à certaines formes d’énergie pouvait entraîner des conséquences
négatives sur l’environnement et(ou) sur la santé humaine. Comment quantifier
ces conséquences ? La tâche est, évidemment, difficile car elle demande de
chiffrer des effets mal connus et selon une grille qui ne peut qu’être largement
arbitraire. Malgré ces difficultés et devant la nécessité de fournir aux
décideurs politiques des éléments de choix entre différentes formes d’énergie
des programmes ont été initiés aux USA et en Europe dans le but de calculer les
coûts externes des diverses formes d’énergie. L’Annexe IV explicite les
principes retenus pour ces calculs et donne les résultats obtenus dans le cadre
du Programme ExternE de l’Union Européenne[27,28]. Ces résultats sont résumés
dans le tableau 12. Il faut souligner que ces résultats ne peuvent sans doute
pas être considérés comme définitifs, le programme se poursuivant pour améliorer
encore les méthodes de calcul.
Charbon (technologie moderne) | 80.4 |
Fioul (technologie moderne) | 24.9 |
Gaz (technologie moderne) | 49.5 |
Nucléaire | 0.3 (2.5 pour un taux d’actualisation de 0%) |
Biomasse | 8.3 |
Hydroélectricité | 2. |
Eolien | 0.5 |
Coûts externes en mEuro/kwh pour les principaux cycles de production. Les incertitudes sont importantes, tout particulièrement en ce qui concerne l’effet de serre[27,28]. |
Le tableau 13 résume les résultats
obtenus pour les coûts internes, externes et totaux
Technique | Coûts internes | Coûts externes | Coûts totaux |
Charbon
(technologie moderne) |
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Gaz
(technologie moderne) |
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Nucléaire |
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Biomasse |
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Hydroélectricité |
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Eolien |
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Coûts en mEuro/kwh pour les principaux cycles de production. |
On voit sur le tableau à quel point la
prise en compte des coûts externes serait susceptible de changer la hiérarchie
des techniques de production. En particulier on observe que le gaz serait alors
plus de deux fois plus cher que le nucléaire. Il faut remarquer que les coûts de
l’éolien et de la biomasse sont extrêmement dépendant des sites et conditions
d’exploitation, si bien que, comme indiqué dans plus haut, ces énergies peuvent
être compétitives dans certains cas.
L'utilisation pertinente des énergies renouvelables est à encourager. Les éoliennes, bien que compétitives sur le plan économiques ne peuvent constituer qu’un apport limité. Il en est de même en ce qui concerne la biomasse. L’énergie solaire pour la production centralisée d’énergie, ne sera pas compétitive dans les prochaines décennies. Des solutions semblent cependant possibles et il faut donc encourager les recherches dans ce sens. D’autre part, on estime à deux milliards d’individus, le nombre de ceux qui ne seront jamais raccordés à un réseau de production d’électricité. Pour ceux là, et aussi pour réaliser des économies d’énergie grâce à des installations individuelles, le développement de l’utilisation de panneaux solaires est fortement souhaitable. Le problème du stockage est un problème important qui n’est pas encore résolu de façon satisfaisante mais l’utilisation de l’hydrogène apparaît être une solution d’avenir à approfondir.
On a montré que les énergies renouvelables sont incapables de satisfaire à toute la demande d'énergie que l'on doit d'ailleurs s'attendre à voir augmenter avec le développement inéluctable de certains pays très peuplés. L'état des réserves en combustibles fossiles (ces derniers peuvent d'ailleurs avoir des utilisations plus nobles que d'être simplement brûlés) et en uranium utilisé massivement dans des réacteurs conventionnels, ne permet pas d'envisager l'avenir sereinement. De plus, la combustion des combustibles fossiles contribue à l'augmentation de l'effet de serre susceptible d'entraîner des modifications climatiques peu souhaitables. Malgré cela, le marché tend à favoriser les générateurs à gaz dont le coût d'investissement est seulement le tiers de celui d'une centrale nucléaire, même en France où le contexte institutionnel est favorable au nucléaire. La prise en compte des coûts externes de l’énergie pourrait, toutefois, modifier profondément la hiérarchie des prix. En attendant l'apparition de nouvelles techniques de production d'énergie comme par exemple la fusion, mais qu'on ne peut envisager avant un siècle, l'électronucléaire devra rester un pourvoyeur important d’énergie. Cette technique a l'énorme avantage de ne pas produire de gaz à effet de serre. Associée à une production massive d'hydrogène, elle pourrait aussi résoudre valablement les problèmes liés aux transports. Encore faut-il que l'énergie nucléaire devienne acceptable par l'opinion publique en démontrant qu'un nouveau Tchernobyl est impossible et que le problème des déchets est résolu. Il convient cependant de noter, qu'en vertu des évolutions présentées sur la figure 3, l'effet est à long terme, les 30% de part de marché ne seront pas atteints avant 2050 dans le cas le plus favorable.
Les réacteurs nucléaires actuels utilisés en France ont fait leurs preuves mais on doit envisager leur remplacement par des solutions innovantes. Les surgénérateurs refroidis au sodium ont posé des problèmes de fiabilité. Le sodium est susceptible de prendre feu spontanément au contact de l’air et d’exploser au contact de l’eau. La conjonction d’un tel fluide de refroidissement et de contraintes de sûreté toujours plus sévères risque de rendre les coûts de construction prohibitifs et la régularité de l’exploitation difficile. Les systèmes hybrides associant un accélérateur de protons à un réacteur nucléaire surgénérateur sous critique pourraient être des alternatives intéressantes aux réacteurs refroidis au sodium puisqu'ils associeraient à la surgénération, une grande sûreté de fonctionnement, l'utilisation de la filière au thorium à la place de l'uranium et la possibilité d'être utilisés comme incinérateurs de déchets.
Annexe I
Diffusion des techniques
Soit N la valeur de la "niche" ou niveau de saturation que peut atteindre un produit donné. Il est raisonnable d’admettre que le taux de croissance est proportionnel à la fois à l’occupation du marché X (le succès entraîne le succès) et au reliquat N-X à conquérir. L’équation de X est ainsi
.
Utilisant la variable réduite (part de niche) et un temps caractéristique , la solution s’écrit d’abord
,
permettant une représentation graphique d’une grande commodité (figure 1) :
Figure A1.
Une droite en effet facilite les ajustements sur les données statistiques. De plus, on peut de la sorte suivre l’évolution sur une période beaucoup plus longue que celle pendant laquelle la pénétration varie de 10 à 90 % de la niche (sur la figure : de 5 à 9 unités de temps).
Sous une forme plus explicite
.
A titre d’exemple, la figure 2, reproduite d’un article de C. Marchetti (1991), montre la façon dont l’énergie nucléaire a pénétré sur le marché de différents pays ou aires géographiques. Les indications portées sur chaque droite sont le niveau de saturation en GW électriques installés et le temps nécessaire au passage de 10 % à 90 % de ce niveau (cette constante de temps à laquelle il est fait référence sur la figure est égale à 4t). Ces chiffres sont déterminées en ajustant le modèle sur les données. Mais le "fit" à une seule droite ne marche pas toujours. Ainsi aux U.S.A., les données sont mieux représentées par une succession de deux phases de pénétration.
Figure A2.
Nous réunissons dans cette annexe une ensemble de chiffres utiles concernant la production d’énergie. Certains des tableaux présentés sont également présents dans le texte principal, mais nous avons pensé que leur réunion ici pourrait être utile au lecteur.Annexe II
L'énergie en quelques chiffres
1 eV=1.6 10-19 Joule(J)
1 J = 6.25 1018 eV
1 MeV =1.6 10-13 J
1 J= 6.25 1012 MeV
1 erg= 10-7 J
1 calorie(cal)=4.169 J
1 BTU (British Thermal Unit)=1055 J
1 Mega-watt-heure (Mwh)=3.6 109 J
1 Mega-Joule(MJ)= 106 J
1 Giga-Joule(GJ)= 109 J
1 Tera-Joule(TJ)= 1012 J
1 Peta-Joule= 1015 J
1 Exa-Joule= 1018 J
Alors que les unités précédentes ont des significations physiques bien définies celles qui suivent ont une part d'arbritraire car elle dépende de la qualité du matériau considéré (pétrole, charbon)
1 Tonne équivalent pétrole(Tep)=10034 Mcal = 42 GJ = 11.7 Mwh
1 Tonne équivalent charbon(Tec)=7000 Mcal = 29 GJ
1 kilotonne de TNT(kt) =4,18 TJ
1 Baril de pétrole(bbl)=159 litres = 136 kg
Rappelons quelques
bilans énergétiques utiles, aussi bien pour des réactions de combustion chimique
que pour des réactions nucléaires
C+O2
CO2+ 4.08 eV où le Carbonne est pris sous la forme
solide(graphite).
CH4+2O2 CO2+2H2O + 8.37 eV, l'eau étant prise sous forme vapeur.
Pour calculer l'énergie dégagée par d'autres réactions nous donnons les énergies de quelques liaisons chimiques[29]:
H-H = 4.52 eV
O-O = 5.16 eV
O-H = 4.45 eV
(OH)-H = 5.17 eV
C-H = 3.51 eV
(CH)-H = 4.69 eV
(CH2)-H = 4.52 eV
(CH3)-H = 4.52 eV
C-O = 11.15 eV
(CO)-O = 5.56 eV
Considérons le cas du butane
2C4H10+13O2 8CO2+10H2O+49.7 eV
Par molécule de
CO2 on trouve 6.2125 eV, une valeur intermédiaire entre le C
et le CH4 .
Les deux
réactions utilisées pour produire de l'énergie sont la fission et la fusion
(pour des applications ponctuelles, dans l'espace ou pour des bouées maritimes,
par exemple, on utilise également les radioactivités a et b).
1 fission = 200 MeV
On peut alors calculer que la fission d'un kilogramme d'Uranium 235 fournit 8.13 1013 J soit
On suppose un facteur de disponibilité annuel de 80 %.
L'énergie électrique fournie vaut: 7 Twh (pour 1000 Mwatts électriques)
L'énergie thermique
consommée: 7.6 104 TJ correspondant à la fission de 950 kilos
d'Uranium et équivalent à 1.8 millions de Tep.
d+t42He+n+17.6 MeV
Le neutron emporte 14 MeV. Il interagit avec l'environnement du plasma, soit en se ralentissant, soit en subissant des réactions (n,2n) et finit par être capturé. En particulier, on cherche à ce que les neutrons thermalisés soient capturés par du 63Li , qui par la réaction:
63Li + n a + t + 4.8 MeV régénère le tritium.
On peut alors calculer que la fusion d'un kilogramme d'un mélange homogène d-t fournit, en incluant l'énergie produite par la réaction de régénération du tritium, 4.3 1014 J, soit
La nécessité de disposer de tritium a des conséquences sérieuses:
En 1990 la
consommation énergétique mondiale s'élevait à 8.8 GTep avec la répartition
suivante[1]:
Tableau A2-1.
Consommation annuelle planétaire
:
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* 1 GTep = 1 milliard de tonnes équivalent pétrole.
** exploitation de la biomasse, essentiellement le bois.
Les rejets de CO2 se montaient, toujours en 1990 à 22 Gigatonnes.
Les réserves prouvées en 1990 pour les combustibles fossiles et l'énergie nucléaire étaient les suivantes[1]:
Tableau A2-2.
Réserves d’énergie planétaires
[1].
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au rythme de consommation actuel |
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Schistes
bitumineux et
Sables asphaltiques |
Plusieurs centaines de GTep | Fraction exploitable non déterminée. |
Hydrates de méthane | Plus
de
1000 GTep |
Fraction exploitable non déterminée. |
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On peut remarquer
que si le nucléaire était amené à représenter 40 % de la production d'énergie
les réserves seraient ramenées à 40 ans dans le cas classique(PWR) et à 2000 ans
dans le cas des surrégénérateurs. Dans ce dernier cas il deviendrait toutefois
rentable d'exploiter des gisements très pauvres si bien que les réserves
seraient, en réalité beaucoup plus importantes.
En 1993 la
consommation française d'énergie en MTep se répartissait comme suit[2]
:
Tableau
A2-3
Structure de la consommation d’énergie primaire en
France
Source |
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Charbon |
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Pétrole |
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Gaz |
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Nucléaire |
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Hydraulique |
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Energies renouvelables |
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Total |
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La consommation des
centrales française (55 centrales de 900 et 1300 Mwatts) se monte à environ 50
tonnes de matière fissile par an. Il faut remarquer que le tonnage de
combustible irradié produit chaque année est beaucoup plus important (environ
1500 tonnes par an) du fait du faible enrichissement du combustible en
235U (3.5%)
Le tableau
ci-dessous compare les consommations de combustibles fossiles et nucléaires(en
MTep), en 1993 dans quelques pays particulièrement importants[2].
Tableau A2-4
Consommation (1996 en MTep) dans différents pays
à partir des différentes sources :
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* y compris d’autres sources.
** données de 1994.
Une centrale équivalente à une centrale nucléaire de 1 Gw, produisant 7 Twh par an demanderait, donc, un empiètement au sol de 26 millions de m2 soit 26 km2. La surface d'un grand département du midi suffirait à faire face aux besoins d'énergie de la France.
Le coût des cellules solaires dépend de la puissance
crête. Actuellement il semble qu'on puisse viser un coût de 25 F par watt
crête(3600 F/m2).
Le stock terrestre de biomasse est de l'ordre de 2 000
Gigatonnes [10]. Le flux de matière correspondant est de l'ordre de 400 Gt/an
(humidité comprise), correspondant à environ 120 Gt/an de matière sèche
(rappelons que le flux de production antropique de Carbonne dans le
CO2 est d'environ 10 Gt/an, soit près de 10% du chiffre ci-dessus) et
représente un contenu énergétique d'environ 71 Gtep/an . Sur ce total, les
prélèvements humains actuels pour l'alimentation sont de l'ordre de 2,1 Gtep .
Les prélèvements pour les matériaux (bois, papier) sont d'environ 0,4 Gtep et
pour la biomasse-énergie d'environ 1,3 Gtep (dont plus de 1,1 Gtep dans les pays
en développement, principalement sous forme de bois de feu). Au total, l'homme
prélève l'équivalent de 3,8 Gtep sur les 71 Gtep de production annuelle de
biomasse, soit moins de 6 p. 100. Dans les scénarios les plus volontaristes
d'utilisation à grande échelle de la biomasse à long terme pour les besoins
énergétiques, tel le scénario de la Conférence des Nations unies de Rio pour
l'environnement et le développement présenté en 1992 pour l'horizon 2050,
l'objectif de la contribution énergétique de la biomasse est de 4,9 Gtep, soit
moins de 7 p. 100 de la production annuelle de biomasse continentale. En
supposant un triplement des prélèvements pour la nourriture et un quadruplement
de ceux pour les matériaux sur la même période, les prélèvements humains sur la
production de biomasse continentale seraient alors de 12,8 Gtep, soit 18 p. 100
de la ressource annuelle disponible.
La ressource éolienne peut s'exprimer en
kwh/m2 de surface brassée. Les meilleurs sites sont aux environs des
côtes et permettent d'atteindre, en France, jusqu'à 5000 kwh/m2. Une
éolienne de 1000 m2 , d'une puissance de l'ordre du Mw crête
produirait donc 5 Gwh/an. Les grosses éoliennes actuelles
attteignent quelques Mw crête.
On estime que l'empiètement au sol nécessaire est de l'ordre de 8 ha/MW, soit encore une production de 60 kwh/m2/an. Ce chiffre est assez nettement inférieur à celui qu'on peut espérer des centrales photovoltaïques, qui pourraient atteindre 300 kwh/m2/an.
Pour la France, le potentiel de production d'électricité éolienne est estimé à 66 TWh/an pour les installations à terre et à 97 TWh/an pour les installations en offshore peu profond (avec moins de 10 m de submersion et à moins de 10 km des côtes). Ce chiffre correspondrait à la production d'une vingtaine de tranches électro-nucléaires et à la mise en service de l'ordre de 100000 éoliennes de grandes puissance à répartir le long de 5000 kms de côtes, soit une densité moyenne de 20 éoliennes par km de côte. Il est clair que le potentiel économiquement exploitable est bien inférieur au potentiel technique et dépend de son prix de vente, aussi bien que des contraintes environnementales. Il faut remarquer que l'énergie éolienne, de part sa nature intermittente ne devient rentable que par couplage au réseau et comme complément à d'autres sources.
Les augmentations des performances et les baisses de coûts des aérogénérateurs ont mené à des conditions de rentabilité des projets qui peuvent être assurées lorsque les tarifs de vente de l'électricité produite tiennent compte non seulement des coûts évités pour les compagnies d'électricité (environ 0,3 F/kWh), mais aussi des différences de coûts pour l'environnement des diverses filières de production de l'électricité. Avec un tarif basé uniquement sur les coûts évités (soit 0,3 F/kWh) la rentabilité ne peut être obtenue actuellement. En revanche, avec un tarif de vente du type de celui accordé au Danemark, soit 0,55 F/kWh en 1997, la rentabilité est atteinte sur les sites sélectionnés par ce pays. Actuellement on atteint des prix de 0.4 F/kwh sur un bon site (au lieu de 2 F/kWh au début des années 1980) et on envisage d'atteindre 0,25 F/kWh en 2005 sur un bon site.
On donne diverses estimations des coûts en mEuros/kwh.
Tableau A2-5
Comparaison des coûts de diverses méthodes de
production d’électricité.
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(traditionnels) |
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(cycles combinés) |
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53 (Allemagne) |
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Système Rubbia |
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A partir du rapport du CME on peut établir le tableau
suivant concernant les rejets de Carbonne (sous forme de CO2 ), de
Soufre ( SO2), et d'Azote ( NO2)en 1990.
Tableau A2- 6.
Taux d’émission de différents polluants par zone
géographique
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(giga tonnes/an) |
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Une comparaison entre les émissions de différents pays est instructive si l'on pense aux efforts que chacun devra fournir pour améliorer la situation.Le tableau suivant est tiré du rapport Souviron[10]:
Tableau A2-7.
Emission par habitant des polluants principaux
selon différents pays
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(kilos/habitant) |
(kilos/habitant) | |
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Nous avons indiqué en remarques les types de ressource les plus utilisées dans le pays considéré pour la production d'électricité. Une partie importante des rejets gazeux proviennent des transports.
Si le CO2 est avant tout un gaz à effet de serre, les oxydes de Soufre et d'Azote sont les précurseurs des pluies acides. Les émissions de Soufre dans un pays comme la Chine correspondent à des retombées de Soufre de plusieurs tonnes par km2, soit plusieurs grammes par m2 en une seule année.
L'importance des rejets actuels de CO2
correspondant à 6 Gtonnes de Carbonne par an sont à rapprocher des flux
naturels: environ 100 Gtonnes émis et réabsorbés par la végétation terrestre et
90 Gtonnes émis et réabsorbés par la surface des Océans.
La réduction de la production de gaz à effet de serre peut se
faire en recourant aux énergies renouvelables. Il faut remarquer que le recours
à la biomasse, s'il rétablit la balance en ce qui concerne le gaz carbonique,
pourrait conduire à des rejets de méthane, si l'on n'y prend pas garde. Or le
méthane est 10 à 20 fois plus efficace que le gaz carbonique en ce qui concerne
l'effet de serre. Elle peut aussi se faire par le recours au Nucléaire. Enfin,
elle peut se faire, de façon partielle en remplaçant le charbon par le gaz, et
surtout en améliorant l'efficacité d'utilisation en réunissant production
d'électricité et production de chaleur. Les gains à attendre de cette technique
sont donnés dans le tableau suivant[10]:
Tableau A2-8.
Comparaison des taux d’émission de polluants par
différentes technologies.
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Annexe III
Les cycles de production dans les filières thorium et uranium
Le couple 232Th-233U est considéré par beaucoup comme le cycle du futur
Dans ce cas les réactions qui interviennent sont les suivantes (T est la demi-vie de l’isotope correspondant) :
232Th + n ® 233Th (T = 22,3 min) + b-
233Th ®233Pa (T = 26,97 jours) + b-
233Pa ®233U (T = 1,59.105 ans par émission alpha ) + b-
et l’élément fissile est 233U.
Le cycle de production de Plutonium est, quant à lui :
238U + n ® 239U (T = 23,45 min) + b-
239U ®239Np (T = 2,35 jours) + b-
239Np ®239Pu (T = 2,41.104 ans par émission alpha ) + b-
Annexe IV.
Les coûts externes
Destruction des sites : on peut alors estimer le coût de la remise en état de ceux-ci après usage (ré appropriation collective des terrils de mines, comblement ou réaménagement des fosses de mines à ciel ouvert, destruction ou réutilisation des friches industrielles …). Là encore l’internalisation des coûts semble possible.
Risques d’effondrement : On voit déjà poindre là une difficulté : ces risques n’étant pas déterministes, on ne peut prévoir quand un effondrement se produira, s’il se produit. Doit-on, alors, donner le même poids aux dégâts se produisant dix ans après l’arrêt d’exploitation et à ceux qui se produiraient cent ou mille ans après ? La problématique est, ici, très semblable à celle des déchets (nucléaires ou chimiques) de longue durée de vie. Si l’on considère que les dégâts potentiels à long terme doivent être pris en compte, il est clair que l’internalisation des coûts devient impossible, car les périodes de temps considérées excèdent la durée de vie des compagnies exploitantes. On peut, alors, tenter d’estimer le coût externe correspondant au risque d’effondrement : quelle en est la probabilité en fonction du temps, quelle pourrait être la taille de la population touchée, combien de décès ou cas d’invalidité éventuels ? Un tel travail permet de faire des comparaisons entre sites d’extraction, d’une part, et entre différents modes de production, d’autre part. Mais une telle comparaison resterait académique si elle ne se traduisait pas par des mesures encourageant les méthodes les moins " dangereuses " pour les générations futures. La mise en œuvre de telles mesures, fiscales ou parafiscales, par exemple, demande que les conséquences d’un effondrement soient chiffrées monétairement. Il faut alors estimer le coût d’une vie humaine, aussi choquant que cela puisse paraître à certains, ou, peut être d’une façon plus facilement acceptable, le montant que l’on consent à payer pour la réduction du risque d'une mort prématurée. On pourra alors prendre, également, en compte les dommages aux biens. Mais quel prix accorder à une vie humaine ? Dépend-elle de la zone géographique considérée ? Et si oui comment ? Dépend-elle de l’époque ? Une réponse affirmative se traduit par l’utilisation d’un taux d’actualisation dans les calculs. L’utilisation d’un tel taux non nul, même faible, conduit très vite à ne pas prendre en compte les évènements très distants dans le temps (ceci est particulièrement important dans le cas des déchets nucléaires de longue durée de vie enfouis en site profond). On voit sur cet exemple simple que si les conséquences d’un effondrement en termes de vies humaines ne semblent devoir faire appel qu’à des données objectives, même si elles s’expriment de façon probabiliste, leur évaluation monétaire inclut des jugements de valeur à caractère éminemment politique.
Rejets nocifs : La combustion de charbon est accompagnée de l’émission de gaz polluants, tels les oxydes de Soufre et d’Azote, et de particules. Pour estimer la nocivité de ces rejets on a mis au point des modèles de dispersion atmosphérique. Il est ensuite nécessaire d’établir une relation entre les doses absorbées et la probabilité pour les sujets exposés de développer une affection. En général, la relation dose effet est supposée linéaire. Se pose toutefois la question d’un seuil éventuel. Il semble que certaines affections n’apparaissent, en effet, pas en deçà d’un minimum d’exposition. Cette observation peut s’expliquer par les difficultés statistiques de mesurer les effets des faibles doses, mais peut, aussi, être compatible avec l’existence d’un seuil. Si les calculs sont faits pour un site unique donné, il est possible que ce seuil ne soit pas atteint, et donc que le coût externe correspondant soit nul. Cette façon de procéder tend, toutefois, à minorer les risques lorsque de nombreuses installations sont mises en œuvre. Une autre difficulté liée aux polluants gazeux (par exemple l’ozone produit par l’action de photons UV sur les oxydes d’azote) est que, bien souvent, ils accélèrent l’évolution de maladies chroniques déjà déclarées (asthme par exemple). On ne peut donc les considérer comme la source unique d’un décès éventuel, mais plutôt comme des facteurs conduisant à un décès plus précoce.
Une fois établi le nombre de décès et de maladies occasionnés éventuellement par les polluants on devra, à nouveau, estimer le coût d’une vie humaine, celui correspondant à un raccourcissement de l’espérance de vie, celui des immobilisations, des hospitalisations et des pertes de jouissance.
Rejets de gaz à effet de
serre :
La combustion de tous les
combustibles solides est accompagnée d’un rejet, plus ou moins important, de gaz
carbonique. Il est très probable que l’accumulation de ce gaz à effet de serre
dans l’atmosphère se traduit, dès à présent, et se traduira encore davantage
dans le futur par une augmentation de la température du globe. Il est donc
légitime d’essayer de quantifier l’effet de cette augmentation. Pour cela on
doit d’abord avoir recours aux modèles établis par les climatologues, afin
d’obtenir la relation entre concentration en CO2 dans l’atmosphère et
la température. Il faut, ensuite, établir le type de conséquences que pourrait
avoir l’augmentation de la température, en incluant dans toute la mesure du
possible l’influence de la rapidité avec laquelle cette augmentation se produit.
Le nombre et la violence accrus des phénomènes météorologiques ainsi prévus
doivent être traduits monétairement, et un taux d’actualisation appliqué.
Chacune de ces évaluations comporte une très large marge d’erreur, et le cumul
de toutes ces erreurs ne peut que rendre l’estimation du coût externe des rejets
de gaz à effet de serre très incertaine.
Les facteurs non pris en
compte :
L’estimation actuelle des
coûts externes apparaît comme très anthropocentrique puisque seules les
atteintes aux vies, propriétés ou droits de jouissance des êtres humains sont
pris en compte. La mise en danger d’espèces animales ou végétales, par exemple,
ne l’est pas en tant que telle. Il faut toutefois remarquer qu’à l’exception des
barrages hydroélectriques, des marées noires et des conséquences possibles de
l’effet de serre, la production d’électricité n’a que peu de conséquences
directes sur les espèces non humaines, en tous cas beaucoup moins que la
production agricole.
Sur un autre registre, on peut se demander si l’analyse
ne devrait pas inclure celles des bénéfices externes. Nous entendons par là, que
l’énergie contribue, également, à sauver des vies humaines ou à allonger la
durée de vie. La théorie économique classique affirme que la valeur d’usage de
l’énergie est égale à sa valeur marchande. Mais, si l’on applique la
problématique du calcul des coûts externes à la valeur d’usage de l’énergie,
celle-ci n’aura plus grand chose à voir avec la valeur marchande : La valeur du
kWh sera, évidemment, très différente dans un pays faiblement développé et dans
un pays très développé. Dans le premier la disponibilité d’énergie
supplémentaire contribuera au fonctionnement des hôpitaux, aussi bien qu’à la
production d’aliments de subsistance. Dans le second il servira, par exemple, à
laisser la télé et l’ordinateur domestique en mode de veille. Une analyse des
bénéfices externes ne devrait pas modifier les coûts relatifs des différentes
formes d’énergie. Par contre elle paraît nécessaire si l’on veut comparer le
prix du Mégawatt et celui du " Négawatt ", par exemple. Les économies d’énergie
n’ont évidemment pas le même sens là où les gaspillages sont nombreux et là où
l’énergie est un besoin vital !
L’Union Européenne a entrepris un programme visant à
déterminer les coûts externes des différentes formes de production d’énergie.
Les calculs sont faits pour des installations concrètes dans différents pays. Il
serait trop long de rapporter ici toutes les hypothèses quantitatives qui
permettent le calcul de ces coûts. Nous nous contenterons d’en fournir quelques
exemples ;
La valeur de référence de la vie humaine a été prise égale à 3.1 MEuro.
Selon leur type les cancers fatals sont estimés à un coût compris entre 1 et 2 MEuro
Le coût d’un décès prématuré d’une quantité DT est estimé à 0.083DT dans le cas de mortalité chronique et à 0.155DT dans le cas de mortalité aiguë.
L’unité correspondante au raccourcissement de la vie humaine est le YOLL (Year of life loss)
Pour le nucléaire on estime 0.05 cancers fatals, 0.12 cancers non fatals et 0.01 effets héréditaires sévères par homme.Sievert.
Pour la dioxine(TEQ) : 100 cancers / mg/kgcorps.jour
Pour les particules de 10 m de diamètre (représentatives, en particulier, des nitrates) : 4.1 10-4 YOLL/pers.an.mg/m3. On tient également compte des atteintes à la santé et de leurs conséquences : hospitalisation, arrêts de travail etc. L’effet des particules de 2.5 m de diamètre (représentatives des sulfates) est 1.7 fois plus important que celui des particules de 10 m de diamètre.
Pour l’Ozone( produit essentiellement par photo réactions sur NO2 et CO) on estime à 1.17 10-5 la probabilité d’un décès par mortalité aiguë pour une concentration atmosphérique de 10-9. Là encore, on prend en compte d’autres atteintes à la santé et, également, des atteintes aux récoltes.
Valeurs extrêmes de référence Euro/t C |
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Valeurs extrêmes à 95% de confiance Euro/t C |
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Valeurs extrêmes des coûts du rejet de la tonne de C en Euros. Taux d’actualisation de 1% |
Le tableau AIV.2 permet de constater la
sensibilité des résultats aux différentes hypothèses de calcul.
Sensibilité |
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Cas de référence |
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Pas d’équité |
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Faible sensibilité climatique |
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Grande sensibilité climatique |
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Influence des hypothèses de calcul sur le coût des rejets. |
On constate à quel point les incertitudes sont grandes. De plus, ni les conséquences de l’effet de serre sur l’écosystème, ni l’augmentation éventuelle du nombre et de l’intensité des météores (tornades, cyclones) ne sont pris en compte.
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Effet de serre |
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Particules |
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SO2 |
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NO2 |
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Total |
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Décomposition des coûts externes des combustibles fossiles en mEuro/kwh En ce qui concerne le gaz, les fuites à la production et dans le transport ne sont pas prises en compte. |
Encore plus que pour les rejets de gaz à effet de serre, il est important de savoir si l'on donne le même poids aux évènements apparaissant dans quelques années et à ceux apparaissant dans 100000 ans. L'affirmative correspond à un taux d'actualisation de 0%. Un taux, même faible de 1% supprime, pratiquement, les conséquences du 14C. A l'échelle du Monde, et pour une période de 100000 ans, on obtient 0.65 cancers mortels par TWh. Au niveau actuel de production d'électricité nucléaire (500 Gwe) et en supposant un fonctionnement pendant 100 ans, on obtiendrait donc 2,3 105 cancers sur 100000 ans, soit 2.2 cancers par an, à comparer à 800000 cancers mortels en Europe chaque année ! En ce qui concerne les travailleurs on obtient 0.02 morts et 0.96 invalidités par TWh. Ici les effets sont à court terme. Ces chiffres incluent les accidents durant la construction et le démantèlement. Les accidents de transport sont pris en compte (effets dus ou non aux radiations) et négligeables : 0.002 décès par an et par réacteur(7 TWh)
Accidents graves :
Les hypothèses supposent une probabilité de fusion de cœur de 10-5 /an/réacteur. Dans un tel cas, on aurait une probabilité de 0.81 pour qu'il n'y ait aucun rejet, et 0.19 pour qu'un rejet important existe. Trois hypothèses sont considérées quant à l'amplitude du rejet important : 0.1, 1, 10% de la radioactivité du cœur. Considérons le cas à 10% (typiquement équivalent à Tchernobyl). On retient la valeur CIPR de 0.05 cancer/Sv. Le rejet de 10% de la radioactivité du cœur correspond à 580000 homme.Sv, soit 29000 cancers. Compte tenu de la probabilité de l’événement, le nombre de cancers par TWh devient : 8.10-3 cancers /TWh.
Finalement, les coûts externes du kWh nucléaire sont
estimés[28], en fonction des taux d’actualisation dans le tableau AIV.4
Taux d’actualisation % |
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Coût externe en mEuro/kwh |
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Valeurs des coûts externes du kWh nucléaire Prix de revient EDF du kWh : 38 mEuro |
La biomasse
Une grande variété de cas, aussi bien en ce qui concerne le combustible (résidus forestiers, bois d’arbre, herbacées), qu’en ce qui concerne les techniques de production d’électricité (bouilleurs, lit fluidisé, gazéification, cycles combinés, cogénération) a été étudiée. Les puissances unitaires des installations prises en considération étaient faibles, de l’ordre de 30Mw.
Les bio-combustibles présentent des caractéristiques proches de celles des combustibles fossiles, avec quelques aspects spécifiques :
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Effet de serre |
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Particules |
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SO2 |
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NOx |
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Composés Organiques Volatils |
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Total |
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Décomposition des coûts externes en mEuro/kwh Pour une centrale utilisant un bio-combustible[27]. |
L’hydroélectricité
Il faut, tout d’abord, distinguer les centrales au fil de l’eau et celles associées à des retenues et des barrages, les impacts des premières étant très faibles. L’essentiel des nuisances de l’hydroélectricité est à impact local, ce qui fait que les coûts externes sont fortement dépendants du lieu d’implantation de la centrale.
Les estimations de l’étude ExternE prennent en compte les impacts sur l’écosystème, les pertes et gains liés à l’utilisation touristique des sites. Les conséquences sur l’aval des réservoirs doivent tenir compte d’effets positifs comme la lutte contre les inondations. Les impacts liés à la construction et au démantèlement sont inclus dans les estimations.
Les frais entraînés par les déplacements de population et la perte de terres arables sont considérés comme internalisés, et, donc, absents du calcul de coûts externes.
Il ne semble pas que les risques liés aux ruptures de barrage aient été pris en compte.
Des différentes études de cas faits en Europe, il ressort que les coûts externes de l’hydroélectricité sont faibles, de l’ordre de 2mEuro/Kwh.
L’éolien.
La problématique de l’éolien ressemble beaucoup à celle de l’hydroélectricité, à l’exception du risque de rupture de barrage. Les nuisances sont surtout liées à l’étape de la fabrication, celles associées à la production étant, essentiellement, le bruit et la modification du paysage. Il faut noter, toutefois, que les études n’ont pas porté sur le stockage de l’énergie, et se sont donc concentrées sur des éoliennes reliées au réseau général.
Les coûts externes calculés pour différents sites européens sont toujours faibles, de l’ordre de 0.5 à 1mEuro/Kwh. Ils sont d’autant plus faibles que les éoliennes sont placées loin des zones habitées.
Charbon (technologie moderne) | 80.4 (28) |
Fioul (technologie moderne) | 24.9 (12) |
Gaz (technologie moderne) | 49.5 (18) |
Nucléaire | 0.3 (2.5 pour un taux d’actualisation de 0%) |
Biomasse | 8.3 |
Hydroélectricité | 2. |
Eolien | 0.5 |
Coûts externes en mEuro/kwh pour les principaux cycles de production. Pour les combustibles fossiles la contribution à l’effet de serre est donnée entre parenthèses. Les marges d’erreur sont importantes, tout particulièrement en ce qui concerne l’effet de serre. |
Références:
1 L’énergie pour le monde de
demain (1993), Conseil Mondial de l’Energie, Technip.
3 C.J. Campbell et J.H. Lahérrère
(1998) Scientific American, vol. 278 n°3; Pour
La Science, n° 247.
4 C. Marchetti (1991), Int. J. Hydrogen Energy, 16, 563.
5 D.H. Meadows & al. (1972), The Limits to Growth, Universe.
6 B. Dessus (1994), Atlas des énergies, Syros.
7 United Nations (1983)
8 J. Jouzel (1998) Evolution du climat : du passé vers le futur conférence débat sur l’énergie, Société Française de Physique, 11 février 1998, Orsay
9 Document de la conférence de Buenos Aires (1998).
10 Rapport de synthèse (1994). Débat National Energie et Environnement, P.Sauviron, ed.
11 J.H. Ausubel (1996), American Scientist, vol. 84 n° 2.
12. B. Dessus & F. Pharabod (1996), L’Energie solaire, P.U.F. Que sais-je?
13 Encyclopedia Universalis
14 J.P. Schapira (1997) in Les déchets nucléaires, R. Turlay ed. E.D.P.
15 H.Nifenecker(1997) in Les déchets nucléaires, R. Turlay ed. E.D.P.
H. Nifenecker, S. David, J.M. Loiseaux, A. Giorni, (1999), Hybrid Nuclear Reactors, Progress in Particle and Nuclear Physics.16 Nuclear Wastes(1996), National Academy Press
17 Bodansky (1996), Nuclear Energy, A.I.P. Press.
18 M. Salvatores & A. Zaeta (1997), in Les déchets nucléaires, R. Turlay ed. E.D.P.
19 G.Vendryes, " Super Phénix, pourquoi ", ed. Nucléon(1997)
20 H.Nifenecker, " Super Phénix en chiffres " site WEB de la SFP
21 C. Bowman et al (1992) N.I.M. A330, 336.
22 C. Rubbia et al. (1995) CERN/AT/95-44 (ET)
23 Document Le Monde (1998).
24 I. Solomon (1998), Centrales solaires : utopie ou réalités ? conférence débat sur l’énergie, Société Française de Physique, 4 mars 1998, Paris.
25 Futuribles (1994), Juillet-Aout.
26 D. Finon & Ph. Menanteau (1994), Evaluation Economique de l’Amplificateur d’Energie. IEPE. Grenoble.
27 A.Rabl et J.V.Spadaro. Rapport final décembre 1997. Travail effectué dans le cadre du programme ExternE.
28 A.Rabl et J.V.Spadaro. Coûts externes et décisions à long terme des électriciens. Nov.1998
29 Handbook of Chemistry and Physics. Chemical and Rubber Company